Le concept Nzondo tire ses origines d’un dialecte parlé dans l’espace Grand Bandundu. Traduit en français par” prophétie ou une prédiction”, Nzondo était usité avec train vers l’orée de la décennie 2000, à travers les médias par un célèbre pasteur d’église dite de réveil à Kinshasa. Il passait son temps, sur une chaîne de télévision privée de la place, à déclarer des ” prophéties” à qui en voulait moyennant espèces sonnantes et trébuchantes.
À l’époque, il s’était d’ailleurs autoproclamé, pince sans rire, prophète des nations. La mayonnaise avait pris tel que des foules accouraient pour recevoir chacun le nzondo proportionnel à sa foi ou à la mesure de ses moyens, avec à l’appui un macaron prophétique. En vérité, je vous le dis, le promoteur du Nzondo avait la pluie et le beau temps, notamment parmi les naïfs de la société congolaise. Le stade des Martyrs de la Pentecôte de Kinshasa en garde encore les stigmates.
L’antre chinois est le témoin muet de cette vaste escroquerie de ce vendeur d’illusions. Cela, pour avoir servi de cadre à des activités religieuses dénommées hideusement “campagne d’évangélisation et de prophétie'”organisées par ce gourou. Chut !. Dieu a horreur des affameurs du peuple, le mouvement s’est arrêté net et son initiateur passe pour un vulgaire personnage grotesque qui arpente les plateaux de télévisions pour vendre les plus funestes de ses créations fantasmagoriques.
Je vous épargne de détail lugubre..Mon voisin de gauche me susurre à l’oreille en me disant que Nzondo continue son petit bonhomme de chemin. D’ailleurs, il n’est plus aujourd’hui l’apanage de célèbre prophète des nations. Plusieurs lui ont emboîté les pas. Mais, cette fois-ci, les annonceurs de ” Nzondo” ont changé de mode opératoire. De nos jours, ils ont fait intrusion en politique.
La politique devient leur domaine de prédilection. Leur ” nzondo” devient de plus en plus orienté vers les acteurs politiques. Particulièrement ceux qui sont dans les institutions du pays. Hélas! Il faut les prévenir très vite. Pour sauver ce qui peut l’être encore. Car, ce terrain est très glissant. Mais, comme l’appétit vient en mangeant, plus rien semble les arrêter. Illustration : La panoplie de ” nzondo” qui ont marqué le processus électoral en cours. Jamais en République démocratique du Congo, les élections ont été émaillées de ” nzondo”.
L’année 2023 était le point culminant de la chaîne de montagnes de ” Nzondo”. En vérité, en vérité, je vous le dis: pendant la campagne électorale, les acteurs politiques n’etaient pas les seuls à tenir la vedette sur la scène nationale. Il y avait aussi des prophètes. Autant, les acteurs politiques étaient divisés sur l’organisation des scrutins combinés de décembre 2023, autant les prophètes l’étaient. Les uns ont dit voir dans leur ” écran” prophétique que ces élections ne devaient pas avoir lieu.
Là où les autres affirmaient le contraire. Ils rassuraient avoir reçu de la part de Dieu un message selon lequel les scrutins combinés devaient avoir lieu. La confusion était totale. Qui devrait-on croire? Qui parlait réellement de la part de Dieu? De grâce! On ne peut les critiquer. Car, on ne touche pas aux oints de Dieu. Dans ces ” nzondo”, on doit prendre ce qui est bon, et rejeter ce qui est mauvais. Ainsi va la vie. Et pourtant, le ” nzondo” n’a pas été vu d’un bon oeil par les féticheurs. Contrairement aux élections précédentes, ces derniers n’ont pas eu de clients. Plusieurs candidats aux élections générales n’ont pas recouru à eux. Les ” makasu” ( noix de cola) et le vin de palme moisissent sous les lits de nganga ( féticheurs) qui se frottaient les mains à la veille des élections. Pour accroître sans vergogne leurs chiffres d’affaires.
Mais, les annonceurs de “nzondo” semblent leur damer les pions. Le comble: ils ont poussé le bouchon trop loin. Dans leur témérité, certains d’entre eux ont livré des “nzondo” contre les institutions du pays. Ce n’est pas tout. Les opposants n’ont pas été épargnés par ces prophètes des temps modernes. Selon leur écran prophétique, leur échec était déjà prévisible.
Même si certains opposants, challengers de Fatshi, à la présidentielle, ne veulent pas s’avouer vaincus Ils sont donc mis en garde. De peur que la colère de Très-Haut ne s’abattent sur eux. Les vidéos de ces prophètes de malheur, devenues virales sur les réseaux sociaux, risquent de faire trouble à la sérénité sociale. Heureusement que le Conseil Supérieur de l’Audiovisuel et de la Communication a réagi à temps. Cela, pour rétablir de l’ordre dans son secteur. Il interdit les ” nzondo” contre les institutions. Comme pour rappeler aux uns et aux autres: ” À Dieu, ce qui est à Dieu, et à César, ce qui est à César”. Pour l’instant, la consigne semble respectée. La trêve observée sur le terrain. Mais, ça serait pour combien de temps? Pour l’instant, croisons les doigts.
Cardoso Ludi