La loi congolaise est muette sur la définition du concept de l’erreur matérielle, ce qui rend difficile la compréhension de la particularité de ce terme. La jurisprudence et la doctrine ont comblé le vide légal de la définition de l’erreur matérielle. Le mot “erreur” tire son origine du latin “error” et dérive du verbe latin “errare” qui signifie en français “se tromper”.
La jurisprudence de la Cour suprême de justice, faisant office de cour constitutionnelle pour combler le vide légal, définit l’erreur matérielle comme étant la correction des erreurs d’orthographe des noms des candidats ou des partis politiques ayant présenté un candidat, ou la correction de la circonscription électorale et non le réexamen de la cause déjà jugée.
Quant au doctrinaire célèbre Gérard Connu, il définit l’erreur matérielle comme étant une inexactitude qui se glisse par inadvertance dans l’exécution d’une opération ou dans la rédaction d’un acte et qui appelle une simple rectification, sans nouvelle contestation, à partir des données en général évidentes qui permettent de redresser l’erreur. L’ancêtre du droit congolais, Antoine Rubbens, estime que l’erreur matérielle porte soit sur le calcul, soit sur la confusion du nom (mercurial sur l’erreur ou l’omission matérielle dans le contentieux du scrutin législatif du 28 Nov 2011). À titre d’exemple, l’erreur matérielle peut être une erreur d’orthographe, de frappe, de plume ou de calcul.
Au regard des définitions de la jurisprudence et de la doctrine, la requête en rectification de l’erreur matérielle ne doit pas modifier la décision judiciaire, car la chose jugée est tenue pour vérité et de plus, nul ne doit être jugé deux fois (non bis Idem). La loi électorale, à son article 74 quinquies, prévoit une requête en rectification de l’erreur matérielle ou en interprétation. Cette requête rectificative ou interprétative doit être examinée conformément à la jurisprudence susévoquée et à la doctrine.
Le juge a le droit de corriger l’erreur matérielle du jugement ou de l’arrêt, non de modifier sa décision (dispositif). En droit, on interprète seulement ce qui est obscur, ambigu et équivoque, ce qui met les parties au procès dans la divergence. Tout juge est tenu de respecter la décision judiciaire et de ne pas la modifier même s’il a commis une erreur énorme de fait et de droit. L’erreur matérielle étant une simple action en justice, non une voie de recours ordinaire et extraordinaire (opposition, appel, tierce opposition, requête civile). En droit, seul le recours modifie la décision judiciaire non coulée en force irrévocable de chose jugée. En matière de rectification de l’erreur matérielle, il n’y a pas de délai légal pour introduire la requête rectificative. Quant aux élections législatives, toute requête en rectification de l’erreur matérielle devant la Cour constitutionnelle tendant à remettre en cause l’arrêt, cela viole l’article 168 alinéa 1 de la Constitution qui prévoit : “Les arrêts de la Cour constitutionnelle ne sont susceptibles d’aucun recours et sont immédiatement exécutoires”.
De plus, la compétence du juge est limitée par le principe de l’intangibilité du titre exécutoire, car le juge ne peut modifier le dispositif de la décision de justice (SERGE GUINCHARD ET TONY MOUSSA, Dalloz action Droit et pratique des voies d’exécution, p.183).
Curieusement, en 2019, la Cour constitutionnelle a délibérément violé la Constitution en créant une chambre spéciale pour annuler son arrêt, c’est vraiment un désastre judiciaire en RDC.
À ce sujet, les députés victimes de l’arrêt inique de la Cour constitutionnelle avaient saisi le Comité des droits de l’homme des Nations unies pour être rétablis dans leurs droits légitimes. Le Comité des droits de l’homme des Nations unies estimait que la Cour constitutionnelle avait violé le Pacte international des droits civils et politiques et recommandait au gouvernement congolais d’indemniser ces députés victimes, car la Cour constitutionnelle avait fait la superposition des arrêts. Somme toute, la requête en rectification de l’erreur matérielle est une simple action en justice qui ne doit pas remettre en cause une décision judiciaire (arrêt, jugement). L’erreur matérielle ne doit pas être confondue avec l’erreur judiciaire. Lorsque le juge condamne un innocent, acquitte un coupable et proclame non élu un député qui n’était pas partie au procès, il s’agit d’une erreur judiciaire non matérielle.
Bettens Ntumba, Chercheur en droit électoral.