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Kinshasa
2 novembre, 2025 - 12:53:54
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Pourquoi la dissolution des partis liés au conclave de Nairobi apparaît-elle inévitable ? [Explications du député national Olivier Kasanda Katuala]

Au cœur d’une crise sécuritaire et politique exacerbée par des ingérences étrangères et des alliances suspectes, le vice-Premier ministre en charge de l’Intérieur, Jacquemain Shabani, a ordonné la suspension immédiate des activités d’une dizaine de partis politiques d’opposition, parmi lesquels : le PPRD (Parti du peuple pour la reconstruction et la démocratie), le LGD (Le Leadership et Gouvernance pour le Développement), PISTE pour l’émergence, l’AAP (Alliance des acteurs pour la paix), l’UDA (l’Union des démocrates africains (UDA) originelle), le MPCR (le Mouvement du Peuple Congolais pour la République), l’ATD (l’Alliance des Travaillistes pour le Développement), la COFEDEC (Convention des Fédéralistes pour la Démocratie Chrétienne), le PNEC (Parti national pour l’émergence du Congo), le MLP (Mouvement lumumbiste progressiste), l’UPC (Union des patriotes congolais) et l’ADCP (Action pour la dignité du Congo et de son peuple). Cette décision, motivée par la participation active de ces partis au conclave de Nairobi des 14 et 15 octobre 2025 — une initiative de l’ancien président Joseph Kabila perçue comme un vecteur de déstabilisation en raison de ses liens présumés avec des groupes armés tels que l’Alliance Fleuve Congo (AFC)/M23 —, s’accompagne d’une saisine du Conseil d’État en vue de prononcer leur dissolution. En tant que député national, je salue cette action résolue du gouvernement, non comme une entrave à la démocratie, mais comme l’expression d’une application rigoureuse du cadre juridique congolais, destinée à préserver l’ordre public et l’intégrité territoriale, principes cardinaux de notre souveraineté.

Les faits à l’origine de cette mesure reposent sur des éléments factuels et analytiques solides. La réunion de Nairobi, qui a rassemblé autour de Joseph Kabila plusieurs figures subversives de l’opposition, a conduit à la création de la plateforme « Sauvons la RDC », dont les douze points programmatiques critiquent ouvertement la gestion sécuritaire et institutionnelle du pouvoir en place, sans jamais condamner explicitement l’agression rwandaise ni les avancées de l’AFC/M23 dans l’Est du pays.

Des analyses d’experts en sécurité régionale soulignent que ce conclave s’inscrit dans un contexte de recomposition des forces anti-gouvernementales, potentiellement alimentée par des soutiens rwandais à l’AFC/M23, groupe armé accusé de crimes de guerre.

La participation de figures telles que Seth Kikuni ou Franck Diongo, dont les déclarations post-conclave appellent à une « action ouverte » contre le pouvoir en place, est interprétée comme une incitation à l’instabilité, en violation des obligations de loyauté nationale imposées aux formations politiques.

Ces agissements ne relèvent donc pas d’une opposition démocratique légitime, mais d’une collusion potentielle avec des acteurs de déstabilisation régionale, comme le corroborent plusieurs rapports onusiens faisant état de flux financiers et logistiques à destination de l’AFC/M23 — des pratiques qui menacent la cohésion nationale, patiemment reconstruite au prix de décennies de conflits.

Sur le plan juridique, cette suspension repose sur un fondement légal solide. L’article 29 de la loi n° 04/002 du 15 mars 2004, portant organisation et fonctionnement des partis politiques, autorise explicitement l’autorité territoriale décentralisée — en l’occurrence, le ministre de l’Intérieur — à suspendre immédiatement les activités d’un parti lorsque celles-ci portent atteinte à l’unité nationale, à l’indépendance, à l’intégrité territoriale, à la souveraineté de l’État ou troublent gravement l’ordre public.

Cette mesure préventive, limitée à quinze jours et prorogeable jusqu’à trente jours par décision judiciaire, est conçue comme un garde-fou proportionné pour préserver la stabilité institutionnelle.

Dans le cas d’espèce, la tenue d’un conclave à l’étranger, en l’occurrence à Nairobi, aligné sur des intérêts hostiles à travers des liens supposés avec l’AFC/M23, constitue une violation manifeste de ces impératifs, justifiant une intervention immédiate afin de prévenir toute escalade politique ou sécuritaire.

La saisine concomitante du Conseil d’État en vue d’une dissolution repose sur une architecture judiciaire réformée. L’article 31 de la loi n° 04/002 du 15 mars 2004, portant organisation et fonctionnement des partis politiques, prévoit que la dissolution peut être prononcée par l’autorité judiciaire en cas de violation des textes constitutionnels, législatifs ou réglementaires, compétence initialement attribuée à la Cour suprême de justice.

Or, la réforme judiciaire de 2011 a supprimé cette Cour et redistribué ses attributions entre trois hautes juridictions : la Cour constitutionnelle pour le contentieux constitutionnel, la Cour de cassation pour les affaires pénales et civiles, et le Conseil d’État pour le contentieux administratif.

La loi organique n° 16/027 du 15 octobre 2016, portant organisation, fonctionnement et compétences des juridictions de l’ordre administratif, confie en effet au Conseil d’État — notamment à sa Chambre des élections, des formations politiques et des organismes professionnels (article 48) — la compétence pour connaître du contentieux partisan, y compris des procédures de dissolution pour motifs légaux tels que les atteintes à la souveraineté nationale.

Si elle était prononcée, une telle dissolution entraînerait des conséquences précises et encadrées, conformément à l’article 31 de la loi précitée et aux principes de proportionnalité. Elle impliquerait la cessation définitive des activités politiques, la perte de la personnalité juridique, l’interdiction d’organiser des réunions ou de collecter des fonds, ainsi que l’exclusion des prochaines élections, privant ainsi les membres du parti de la capacité de présenter des candidats. Les biens du parti seraient alors liquidés judiciairement, avec dévolution successorale selon les statuts ou, à défaut, au Trésor public.

Au-delà de cette rigueur juridique, ces décisions traduisent un patriotisme lucide et une gouvernance résiliente. La République démocratique du Congo, vaste État tampon des Grands Lacs, ne peut se permettre que des partis politiques, sous couvert d’opposition, s’associent à des dynamiques subversives voire sécessionnistes. En protégeant l’unité et la souveraineté nationales, le gouvernement réaffirme que la paix prime sur les ambitions partisanes.

Il s’agit d’un véritable acte de “stewardship” politique, conforme aux meilleures pratiques démocratiques : encourager une opposition constructive, non destructrice.

En somme, ces mesures ne visent pas à restreindre la pluralité politique en RDC, mais à la préserver de ses dérives toxiques et déstabilisatrices.

Olivier Kasanda Katuala

Député national

 

 

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