Le 4 janvier 1959, Léopoldville s’embrasait sous la pression d’un peuple déterminé à briser les chaînes du joug colonial. Ce jour-là, la répression sanglante des autorités belges contre une manifestation initialement pacifique marqua un tournant décisif dans la lutte pour l’indépendance. Si les émeutes ont coûté la vie à des centaines de personnes, elles ont aussi galvanisé l’élan indépendantiste, porté par des figures comme Joseph Kasa-Vubu. Aujourd’hui, cette date symbolique reste un puissant rappel des sacrifices consentis pour la liberté et l’émancipation nationale.
Léopoldville, 4 janvier 1959. Une tension sourde plane sur la capitale du Congo belge. Ce jour-là, une réunion publique de l’ABAKO (Alliance des Bakongo), prévue dans la commune de Kalamu, avait été reportée sous la pression des autorités coloniales. Mais les espoirs, les frustrations et les aspirations d’un peuple en quête de liberté ne se dissipent pas si aisément.
Dès les premières heures, une foule dense commence à se rassembler près de l’YMCA de Kalamu. Malgré l’annonce du report, Joseph Kasa-Vubu, leader de l’ABAKO et futur premier président du Congo, adresse un court message à ses partisans : la réunion aura lieu après la déclaration prévue du roi Baudouin Ier, attendue le 13 janvier.
Ce moment aurait pu rester anodin, mais le terreau de la révolte était déjà fertile. En quelques heures, le mécontentement populaire s’intensifie. Des dizaines de milliers de personnes, parmi lesquelles des amateurs de football furieux de la défaite de leurs équipes locales, se joignent aux manifestants. Les revendications politiques se mêlent à une colère plus diffuse, et bientôt, Léopoldville bascule dans le chaos.
Une insurrection incontrôlée
Les symboles du pouvoir colonial deviennent la cible principale de la foule en furie. Des maisons européennes, des magasins, des missions religieuses et des édifices administratifs sont pillés et incendiés. Face à cette explosion de violence, les forces de l’ordre réagissent brutalement. Des soldats et des policiers tirent sur les manifestants pour rétablir l’ordre.
Le bilan des événements est tragique : selon les estimations, entre 49 et plusieurs centaines de personnes perdent la vie au cours des quatre jours d’émeutes. La ville est en état de siège, et la répression s’abat également sur les figures politiques. Joseph Kasa-Vubu et d’autres leaders de l’ABAKO sont arrêtés et emprisonnés, mais l’écho de ces événements dépasse les frontières du Congo.
Un tournant dans la lutte pour l’indépendance
Le 4 janvier 1959 marque un point de non-retour pour les aspirations indépendantistes du Congo belge. Cet événement, connu plus tard comme la Journée des Martyrs, fait le tour du monde, attirant l’attention sur la question coloniale et galvanisant les militants politiques du pays.
Le 13 janvier, en réponse aux troubles, le roi Baudouin Ier prononce un discours historique. Il y annonce une décentralisation accrue, une extension du système électoral et la fin des discriminations raciales au Congo. Bien que ces annonces soient encore loin d’une indépendance totale, elles constituent une avancée significative dans le processus de décolonisation.
Une mémoire vivante
Soixante-six ans plus tard, le souvenir du 4 janvier 1959 reste profondément ancré dans la mémoire collective congolaise. Cette journée est célébrée chaque année pour honorer les sacrifices de ceux qui ont perdu la vie dans la quête de liberté et d’autodétermination. En 2025, bien que la commémoration officielle ait eu lieu le 3 janvier, le symbolisme de cette date demeure intact.
C’est une occasion de rappeler au peuple congolais l’importance de cette lutte, qui aboutira à l’indépendance du Congo le 30 juin 1960. Ce 4 janvier 2025, les martyrs de la liberté continuent d’inspirer un pays en quête de justice, de dignité et de développement.
Pitshou Mulumba