Au cœur de l’Amazonie, là où se joue l’avenir de la planète, Luiz Inácio Lula da Silva sonne l’alarme et l’espoir. Depuis Belém, le président brésilien appelle les puissances du Nord et les nations du Sud à un sursaut collectif, loin des discours creux et des promesses sans lendemain. Trente ans après le Sommet de la Terre de Rio, le monde revient au Brésil, non plus pour célébrer des engagements, mais pour constater l’urgence d’agir. Lula veut faire de la COP30 “la COP de la vérité” : celle des actes, du financement juste et de la transition énergétique réelle. À la tête d’un pays qui a déjà réduit de moitié la déforestation en deux ans, il plaide pour une gouvernance climatique mondiale refondée et un fonds d’investissement inédit, le Tropical Forests Forever Fund, destiné à rémunérer ceux qui préservent la forêt. À Belém, Lula place la dignité des peuples, la justice climatique et la survie de l’humanité au centre du débat.
Retrouvez ci-dessous le discours intégral du président Luiz Inácio Lula da Silva au Sommet de Belém, prélude à la COP30
COP 30, l’heure de la vérité
Aujourd’hui commence, dans l’Amazonie brésilienne, le Sommet de Belém, qui précède la 30e Conférence des Nations Unies sur le changement climatique (COP30). J’ai convoqué les leaders du monde entier pour cette réunion, peu de jours avant l’ouverture de la COP, afin que tous s’engagent à assumer leur responsabilité multilatérale d’agir avec l’urgence qu’exige la crise climatique.
Si nous n’agissons pas de façon effective, au-delà des discours, nos sociétés ne croiront plus, de façon générale, aux COP, au multilatéralisme et à la politique internationale.
Le Brésil a accueilli le Sommet de la Terre en 1992. Nous avons approuvé les conventions sur le Climat, la Biodiversité et la Désertification, de même que les principes qui ont établi un nouveau paradigme et la voie pour préserver la planète et l’humanité. Au cours de ces 33 ans, les rencontres ont abouti à des accords et des objectifs importants pour la réduction des gaz à effet de serre (atteindre zéro déboisement, tripler l’utilisation de l’énergie renouvelable, entre autres).
Plus de trois décennies après, le monde revient au Brésil pour discuter de la lutte contre le changement climatique. Ce n’est pas un hasard si la COP30 a lieu au cœur de la forêt amazonienne. C’est l’occasion pour les responsables politiques, diplomates, activistes et journalistes de connaître la réalité de l’Amazonie.
Nous voulons que le monde voie la situation réelle des forêts, du plus grand bassin hydrographique de la planète et des millions d’habitants de la région. Les COP ne doivent pas être seulement une foire de bonnes idées ni un voyage annuel des négociateurs. Elles doivent être l’occasion d’un contact avec la réalité et d’une action effective dans la lutte contre le changement climatique.
Pour combattre ensemble la crise climatique, nous avons besoin de ressources. Et aussi de reconnaître que le principe des responsabilités communes mais différenciées continue d’être la base incontournable de tout pacte climatique légitime.
Pour cette raison, le Sud global exige plus d’accès aux financements. Non par charité, mais par justice. Les pays riches ont été les grands bénéficiaires de l’économie fondée sur le carbone. Ils doivent, en conséquence, être à la hauteur de leurs responsabilités. Non seulement assumer des engagements, mais honorer leurs dettes.
Le Brésil est en train de faire ce qui lui revient. En deux ans, nous avons déjà réduit de moitié la surface déboisée en Amazonie, démontrant qu’il est possible d’agir concrètement pour le climat.
Nous irons lancer, à Belém, une initiative innovante pour préserver les forêts : le Fonds Forêts Tropicales pour Toujours (TFFF, en anglais). Il est innovant car il s’agit d’un fonds d’investissement et non d’un don. Le TFFF rémunérera ceux qui maintiendront et protégeront leurs forêts et aussi ceux qui investiront dans le fonds. Une logique gagnant-gagnant dans la lutte contre le changement climatique. Donnant l’exemple, le Brésil a annoncé un investissement d’un milliard de dollars dans le TFFF et nous attendons des contributions tout aussi ambitieuses d’autres pays.
En outre, nous avons donné l’exemple en devenant le deuxième pays à présenter sa nouvelle Contribution Déterminée au niveau National (CDN). Le Brésil s’est engagé à réduire entre 59 et 67 % ses émissions, incluant tous les gaz à effet de serre et tous les secteurs de l’économie.
C’est dans cette perspective que nous appelons tous les pays à présenter des CDN aussi ambitieuses et à les mettre en œuvre sans délai.
La transition énergétique est fondamentale pour atteindre les objectifs de la CDN brésilienne. Notre matrice énergétique est l’une des plus propres du monde, avec 88 % de l’électricité provenant de sources renouvelables. Nous sommes les leaders en biocarburants et nous progressons dans les énergies éolienne, solaire et hydrogène vert.
Affecter les ressources issues de l’exploitation du pétrole pour financer une transition énergétique juste, ordonnée et équitable sera fondamental. Les sociétés pétrolières du monde, comme la société brésilienne Petrobras, se transformeront, avec le temps, en entreprises d’énergie, puisqu’il est impossible de continuer indéfiniment avec un modèle de croissance fondé sur les combustibles fossiles.
Les populations doivent être au cœur des décisions politiques sur le climat et la transition énergétique. Il faut reconnaître que les secteurs les plus vulnérables de notre société sont les plus touchés par les effets du changement climatique ; les plans de transition juste et d’adaptation doivent donc viser à réduire les inégalités.
Nous ne devons pas oublier que deux milliards de personnes n’ont pas accès à la technologie et à des sources d’énergie propres pour cuisiner, et que 673 millions de personnes ont encore faim dans le monde. Pour répondre à ce défi, nous allons lancer, à Belém, une Déclaration sur la Faim, la Pauvreté et le Climat. Il est essentiel que l’engagement dans la lutte contre le réchauffement climatique soit directement lié à la lutte contre la faim.
Il est également fondamental d’avancer dans la réforme de la gouvernance mondiale. Aujourd’hui, le multilatéralisme souffre de la paralysie du Conseil de sécurité de l’ONU. Créé pour préserver la paix, il ne parvient pas à empêcher les guerres. Pour cela, c’est notre devoir de lutter pour la réforme de cette institution.
À la COP30, nous proposerons la création d’un Conseil du Changement Climatique à l’ONU, rattaché à l’Assemblée générale. Une nouvelle structure de gouvernance, forte et légitime, pour garantir que les pays tiennent leurs engagements. Un pas concret pour briser la paralysie actuelle du système multilatéral.
À chaque Conférence sur le Climat, nous entendons beaucoup de promesses, mais peu d’engagements réels. L’époque des proclamations de bonnes intentions est révolue : l’heure est venue des plans d’action. C’est pourquoi nous commençons, aujourd’hui, la « COP de la vérité ».
Luiz Inácio Lula da Silva Président du Brésil
Pitshou Mulumba

