77.38 F
Kinshasa
19 décembre, 2025 - 20:06:35
Image default
AnalysesFlash InfosLa uneSécurité

Uvira : le retrait annoncé de l’AFC/M23 confirme l’autorité de Kigali sur la guerre dans l’Est

Le retrait annoncé des forces de l’AFC/M23 de la ville d’Uvira n’est pas un geste de paix. Il est l’aveu, tardif mais éclatant, d’un rapport de force diplomatique désormais assumé. Sous pression directe des États-Unis, Kigali a reculé, non par conviction, mais par calcul. Et ce recul met fin à une fiction entretenue depuis trop longtemps : celle d’un conflit prétendument « interne » à la République démocratique du Congo. La médiation américaine ne s’est pas adressée à l’AFC/M23. Elle s’est imposée à un État, le Rwanda, signataire des accords de Washington. Les jeux sont désormais clairs. Les violations des droits humains commises à l’Est ne relèvent plus de zones grises. Elles engagent politiquement et moralement Kigali. Dans cette séquence, la RDC démontre une force souvent sous-estimée : celle de la diplomatie patiente, méthodique, capable d’obtenir des victoires sans livrer bataille. Comme l’écrivait Sun Tzu, « la plus haute forme de victoire est d’amener l’ennemi à la soumission sans avoir à livrer bataille, par la diplomatie, l’intelligence et la préparation, en brisant sa volonté et ses plans avant même le conflit physique, car la guerre est coûteuse ».

Le communiqué de l’Alliance Fleuve Congo (AFC/M23), annonçant le retrait unilatéral de ses forces de la ville d’Uvira, se veut un texte de paix. Il se présente comme une contribution au « processus de Doha » et invoque la « médiation américaine ». Mais à y regarder de près, ce document révèle moins une volonté d’apaisement qu’un aveu politique majeur : celui d’une chaîne de commandement qui ne se situe ni à Uvira ni dans les maquis congolais, mais bien à Kigali.

Car la médiation américaine évoquée n’a jamais concerné l’AFC/M23. Elle s’inscrit dans un cadre strictement interétatique, entre la République démocratique du Congo et le Rwanda. Les accords de Washington ont été signés par des chefs d’État. Paul Kagame y est partie prenante. Corneille Nangaa et ses groupes armés ne le sont pas. Leur invocation de cette médiation relève donc d’une appropriation abusive, destinée à maquiller une réalité devenue difficilement contestable.

Une injonction adressée à Kigali, exécutée par ses relais

Le retrait annoncé d’Uvira n’est pas une initiative rebelle. Il est la conséquence directe d’une pression diplomatique exercée sur le Rwanda par les États-Unis. L’ordre est donné à Kigali ; l’exécution est déléguée à l’AFC/M23. Ce mécanisme, désormais visible, réduit à néant le discours selon lequel il s’agirait d’un conflit congolais endogène. Il confirme au contraire l’existence de forces supplétives agissant comme des instruments, non comme des acteurs autonomes.

Dès lors, la question des responsabilités ne peut plus être esquivée. Les violations des droits humains documentées à Uvira et dans d’autres zones sous occupation doivent être politiquement imputées à l’État qui conserve la capacité de commandement réel. À force de nier l’évidence, Kigali se retrouve aujourd’hui confronté à ses propres contradictions.

La rhétorique de la paix comme écran de fumée

Le communiqué de l’AFC/M23 multiplie les références à la protection des civils, à la démilitarisation et à la gestion neutre des villes. Mais cette rhétorique contraste brutalement avec les faits observés sur le terrain : exactions, déplacements forcés, intimidations et tentatives répétées d’administration parallèle. En réclamant une « force neutre » après avoir occupé militairement des territoires, le mouvement illustre une stratégie éprouvée : créer le chaos, puis se poser en garant de l’ordre.

Dans cette configuration, la RDC apparaît moins isolée qu’on ne l’a souvent dit. Par la voie diplomatique, elle a obtenu ce que les armes seules n’auraient pu garantir durablement : un repositionnement clair des acteurs, une désignation implicite des responsabilités et un recul tangible de l’agresseur.

La bataille d’Uvira n’a pas été gagnée sur le champ militaire, mais sur celui des alliances, du droit international et de la constance politique. Une victoire silencieuse, mais stratégique.

Car si les armes parlent encore à l’Est, les lignes, elles, ont bougé. Et cette fois, nul ne peut prétendre ne pas savoir qui commande et qui exécute.

Infos27

ça peut vous intéresser

Laisser un Commentaire

Infos27.CD utilise des cookies pour améliorer votre expérience utilisateur. Nous supposerons que vous êtes d'accord avec cela, mais vous pouvez vous désinscrire si vous le souhaitez. Accepter En Savoir Plus