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3 décembre, 2024 - 17:48:12
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L’Écrivain, analyste politique et conférencier, Gaspard-Hubert Lonsi Koko commente les élections de décembre 2023 en RDC

Interview

Quel regard portez-vous sur les élections générales qui se sont tenues, le 20 décembre 2023, en RDC ? 

Mon attention s’est surtout focalisée sur la non-consolidation de la CENI par une loi qui aurait dû définir clairement son champ d’action et ses partenaires institutionnels sans pour autant sombrer dans la mise sous tutelle. En effet, pour ne pas altérer son indépendance fonctionnelle, la CENI aurait dû dépendre du ministère de l’Intérieur que sur les plans financier et administratif et fonctionner en toute impartialité. Elle aurait dû fonctionner sur la base d’un contrat d’objectifs et de performance (COP) signé avec les ministères du Budget et de l’Intérieur.

Selon vous, la CENI a-t-elle été à la hauteur de l’enjeu ? 

Les anomalies constatées doivent nous inciter à réformer en profondeur la CENI dans sa composition et son fonctionnement. Il faudrait réfléchir au statut approprié en vue de sa performance. Seule une innovation permettra de garantir la supervision dans la transparence des listes électorales et la sincérité des scrutins. Plus explicitement, la CENI doit être chargée de l’application des textes relatifs au processus électoral, à la collecte des résultats électoraux, à la redéfinition des circonscriptions électorales, ainsi qu’à leur publication et transmission au ministère de l’Intérieur. Elle doit enfin devenir un établissement public administratif doté d’une indépendance fonctionnelle. Placée sous l’autorité administrative du ministère de l’Intérieur, elle doit statuer en toute autonomie sur les résultats électoraux. Enfin, en tant qu’établissement public, elle doit compter en son sein une entité administrative, la CENI proprement, et une entité juridictionnelle, à savoir une Cour nationale du processus électoral (CNPE).

Quel bilan dressez-vous du premier mandat de Félix Tshisekedi ? 

Il est important de rappeler l’ambiguïté ayant fragilisé d’entrée de jeu le mandat présidentiel finissant à cause de la coalition entre le FCC de Joseph Kabila et le CACH de Félix Tshisekedi. Pis encore, la majorité ayant été formée en décembre 2020 à l’issue de la rupture entre les deux formations a mis en évidence le mariage de la carpe et du lapin avec comme conséquence la méfiance et le quant-à-soi. Certes, l’action de Félix Tshisekedi a été couronnée de quelques échecs. Sur le plan politique, le président aurait dû dissoudre le Parlement et non s’arranger avec des hypocrites. Sur les plans social et économique, on peut dire que les conditions de vie des Congolais n’ont pas été améliorées. Autre chose : la promesse sur l’irrévocabilité de la nationalité congolaise d’origine n’a pas du tout été tenue. Malgré une union faite seulement pour éviter la dissolution du Parlement, ainsi que le peu de temps dont a disposé le président de la République à la tête d’une majorité circonstancielle et le contexte international difficile, le bilan, évidemment mitigé, n’est pas si négatif que ne le prétend l’opposition. Au-delà de la gratuité des frais d’accouchement et de l’enseignement à l’école primaire, la lutte contre l’insécurité et la volonté d’empêcher l’occupation de la région du Kivu par des forces étrangères ont caractérisé l’action de Félix Tshisekedi. Après un mandat qui a été faussé dès le départ, il y a nécessité de consolider le peu d’acquis. L’objectif, c’est de réconcilier tous les Congolais. Le moment est venu de consolider la souveraineté et la viabilité de notre pays.

D’aucuns soutiennent que l’absence d’un candidat unique a fragilisé l’opposition. Qu’en pensez-vous ? 

Il est évident que la candidature unique de l’opposition aurait permis soit d’éviter les dérapages du processus électoral, soit de crédibiliser la position des opposants à l’issue de différents scrutins. L’absence d’un front commun a démontré l’incapacité à se rassembler en vue de l’intérêt national. Plutôt que de verser les larmes de crocodile, il faudrait désormais œuvrer pour une opposition constructive et non s’activer à mettre le pays à feu et sang, ni à le fragiliser au profit de nos ennemis. L’opposition ayant un statut naturel dans une démocratie, elle doit user de son droit et des moyens appropriés pour exercer pacifiquement un contrôle des institutions étatiques. Notre pays a plus que jamais besoin d’une opposition soucieuse uniquement des intérêts publics, la loi de l’alternance étant celle de la démocratie. Le droit de gouverner, qui n’est pas absolu, s’obtient sur la base de la contradiction en vue du changement.

Êtes-vous favorable à l’annulation de ces élections, comme l’exige l’opposition ? Au vu de la fragilité dans laquelle se trouve notre pays au regard des menaces de balkanisation et de coup d’État, la cohésion nationale doit être privilégiée. L’annulation de ces élections risquerait de condamner à jamais l’unité nationale au profit de ceux qui veulent faire main basse sur nos richesses et morceler notre pays. Ainsi reviendra-t-il au président réélu, la balle étant désormais dans son camp, de réconcilier tous ses compatriotes, de l’intérieur comme de l’extérieur, en vue de l’unité du Congo et de sa pacification.

Propos recueillis par Robert Kongo, correspondant en France

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