Lors de la 10ᵉ édition du Forum Makutano tenue à Kinshasa, au cours du panel intitulé « Où en est-on avec le Grand Inga ? En attendant Inga, l’heure des mini-réseaux », Fabrice Lusinde, directeur général de la Société nationale d’électricité (SNEL), a mis en lumière une problématique cruciale pour l’avenir énergétique de la République démocratique du Congo : la dépendance écrasante au charbon de bois, communément appelé makala, qui représente 94 % de la consommation énergétique nationale. Ce recours massif coûte annuellement 4 milliards de dollars au pays, tout en aggravant des phénomènes tels que la déforestation et les désastres environnementaux. Fabrice Lusinde a souligné que cette situation freine l’émergence d’une politique énergétique durable et expose la nécessité impérieuse de diversifier les sources d’énergie, afin de garantir un avenir à la fois économiquement viable et écologiquement responsable. Pour répondre à ce défi, il a rappelé que la priorité actuelle réside dans la mise en œuvre de la phase 1 du Programme Inga, laquelle prévoit la construction du barrage de la Bundi et de l’usine d’Inga 3, accompagnée de l’installation des deux premières turbines. Ce projet, jugé stratégique, nécessite la création d’une Société de Projet dédiée, calquée sur le modèle de gestion ayant permis la réalisation d’Inga 1 entre 1968 et 1972.
La République démocratique du Congo, riche en ressources naturelles mais paradoxalement embourbée dans une crise énergétique chronique, consacre annuellement une somme astronomique de 4 milliards de dollars au charbon de bois, localement appelé makala. Ce chiffre, dévoilé par Fabrice Lusinde, directeur général de la Société nationale d’électricité (SNEL), lors de la 10ᵉ édition du Forum Makutano à Kinshasa, au Panel sur la thématique : « où en est-on avec le Grand Inga? En attendant Inga, l’heure des mini-réseaux », illustre une réalité troublante : 94 % des besoins énergétiques des ménages reposent sur cette ressource.
Une dépendance énergétique qui sape l’avenir
Dans un pays où le bois-énergie constitue jusqu’à 94 % du mix énergétique, le makala est plus qu’une commodité : il est une institution socio-économique. Employé dans les cuisines de millions de foyers, il représente une source de revenu pour une vaste chaîne d’intermédiaires, des producteurs ruraux aux détaillants urbains. Toutefois, son impact est alarmant. Cette dépendance engendre une déforestation massive, dégrade les sols, et contribue au réchauffement climatique, compromettant ainsi les objectifs environnementaux nationaux.
Fabrice Lusinde a tiré la sonnette d’alarme : « Nous ne pouvons pas bâtir un avenir énergétique durable en restant prisonniers de cette dépendance archaïque. » Il a plaidé pour une transition, même progressive, vers des solutions électriques, notamment à travers des projets pilotes lancés par la SNEL. Ces initiatives ont montré qu’une offre énergétique fiable et financièrement accessible réduit sensiblement la consommation de charbon de bois dans les zones électrifiées.
Un marché énergétique sous-exploité
Avec une demande énergétique globale estimée à 6 milliards de dollars par an, la RDC se trouve à un carrefour stratégique. Sur ce total, à peine 1,2 milliard est alloué à l’électricité. Ce déséquilibre, aussi frappant qu’il soit, constitue une opportunité pour la SNEL et d’autres opérateurs énergétiques. L’électrification massive des zones rurales, où le makala règne en maître, pourrait non seulement réduire la pression sur les écosystèmes forestiers, mais aussi favoriser un développement économique inclusif.
Le rôle des industries extractives, souvent critiquées pour leur faible contribution aux infrastructures locales, a également été évoqué. Leur implication dans la construction d’un réseau énergétique moderne, notamment par l’investissement dans des centrales solaires ou hydroélectriques, pourrait transformer le paysage énergétique du pays.
Une transition semée d’embûches
Cependant, cette ambition se heurte à des obstacles majeurs. Le faible taux d’accès à l’électricité – à peine 19 % de la population selon les estimations – s’accompagne de réseaux vétustes et d’un cadre réglementaire peu incitatif. De surcroît, les habitudes des consommateurs, profondément ancrées dans l’utilisation du charbon de bois, ne peuvent être modifiées sans une campagne massive de sensibilisation et des mesures économiques adaptées, telles que des subventions pour l’acquisition d’appareils électriques ou la réduction des tarifs énergétiques.
La recette de Fabrice Lusinde est simple. C’est que la priorité actuelle réside dans la concrétisation de la phase 1 du Programme Inga, qui consiste à construire le barrage de la Bundi et l’usine d’Inga 3. Ce projet ambitieux, qui se veut structurant pour le développement énergétique de la RDC, s’inspire du modèle ayant conduit à la réalisation d’Inga 1 entre 1968 et 1972. À cette fin, la création d’une Société de Projet Inga 3 est indispensable pour coordonner les efforts et mobiliser les ressources nécessaires.
Phase 1 : Une ambition à l’horizon 2032
Cette première étape, qui s’étendrait sur une période de cinq à six ans, englobe les travaux de génie civil pour le barrage de la Bundi ainsi que la construction de l’usine d’Inga 3, avec l’installation des deux premières turbines. Le calendrier envisagé prévoit un démarrage des travaux en 2026, pour une finalisation en 2032.
Cependant, avant de lancer les travaux, deux axes prioritaires doivent être réalisés : Finaliser les études d’ensemble d’ici 2026, pour garantir une planification minutieuse ; Mobiliser un financement de 8 à 9 milliards de dollars sur la période 2025-2032, soit environ 1,5 milliard de dollars par an.
En parallèle, Fabrice Lusinde insiste sur la nécessité de former des ingénieurs congolais compétents, capables d’assurer la gestion et l’exploitation de l’infrastructure.
Phase 2 : Vers l’autonomie financière
À partir de 2032, la mise en service des deux premières turbines permettra de générer des revenus grâce à la vente d’électricité. Ces fonds seront réinvestis dans la fabrication, l’installation et la mise en service des turbines restantes, un processus prévu jusqu’en 2040. Ce modèle autofinancé marque une étape cruciale dans l’indépendance énergétique du projet.
Phase 3 et suivantes : Une vision pour le développement industriel
Dès 2032, une fois la phase 1 achevée, le programme prévoit la construction progressive des centrales Inga 4 à Inga 8. Ces infrastructures s’inscriront dans le cadre du programme d’industrialisation de la RDC pour 2035-2050, répondant ainsi aux besoins croissants d’électricité pour soutenir l’essor économique du pays. Les revenus générés par ces nouvelles centrales contribueront à rembourser les investissements initiaux, notamment les travaux de génie civil du barrage de la Bundi.
Projets structurants et intégrateurs : Feuille de route 2025-2029
En outre, Fabrice Lusinde a présenté un aperçu du programme des projets structurants et intégrateurs de la SNEL pour la période 2025-2029. Ce programme s’inscrit dans le cadre de la Politique des entreprises du Portefeuille, adoptée par le Conseil des Ministres le 20 septembre 2024. Il vise à renforcer les infrastructures énergétiques tout en favorisant un accès plus large et fiable à l’électricité.
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