Le gouvernement Barnier risque d’être renversé dès cette semaine. En effet, la perspective de l’utilisation du 49.3 pour faire adopter le budget 2025 fait planer la menace d’une motion de censure par les différentes oppositions qui appellent, dans cette hypothèse, une démission d’Emmanuel Macron. Et plus étrange, cet appel a été évoqué par des personnalités politiques qui ne sont pas forcément issues de l’opposition.
Le Premier ministre, Michel Barnier, a affirmé sur TF1, mardi 26 novembre, qu’il utiliserait « assurément » l’article 49.3 en l’absence de soutien à l’Assemblée nationale. Une décision qui le place sous la menace d’une motion de censure qui inquiète les marchés et fait craindre au locataire de Matignon une « tempête ». Ainsi une partie de la classe politique, de la gauche jusqu’à l’extrême droite, souhaite que le chef de l’État démissionne de son poste si le gouvernement est renversé.
Ce sont deux annonces qui surprennent, parce qu’elles viennent de deux personnalités qu’on peut placer parmi les alliés du camp présidentiel.
Mercredi 27 novembre, le rapporteur général du Budget à l’Assemblée nationale, le centriste Charles de Courson, et le maire Les Républicains (LR) de Maux, Jean-François Copé, ont tous deux plaidé pour une démission du président Emmanuel Macron pour sortir de la crise provoquée par la dissolution de l’Assemblée nationale en juillet dernier.
« Le problème, c’est le chaos politique déclenché par le président de la République », a affirmé à la presse Charles de Courson, député du groupe Liot (Libertés, Indépendants, Outre-mer et Territoires). Quel que soit le Premier ministre qui serait nommé « il n’aura pas de majorité. La seule solution, ce serait une démission du président », a-t-il déclaré.
« IL NE PEUT PAS TENIR JUSQU’EN 2027 »
Sur BFMTV, Jean-François Copé, ancien patron de la famille politique dont est issu le Premier ministre, Michel Barnier, a abondé dans le même sens. « On est tous victimes de cette dissolution qui ne ressemble à rien et dont on paye tous les jours le prix », a-t-il expliqué. Une référence à la tripolarisation de l’Assemblée nationale, qui réduit les marges de manœuvre du gouvernement, entravé par une majorité de groupes d’opposition. Face à ce casse-tête, « il n’y a plus qu’une solution, c’est une nouvelle élection présidentielle. Il faut qu’elle soit anticipée », a poursuivi l’ancien ministre du Budget. « Il n’y a qu’Emmanuel Macron qui ne s’est pas rendu compte. Mais il va bien falloir qu’à un moment ou un autre, ses amis ou ceux qui l’aiment bien le lui disent, qu’il ne peut pas tenir jusqu’en 2027, c’est impossible », a-t-il martelé.
Selon un sondage Elabe pour BFMTV, une large majorité de Français (63%) estime que le président de la République devrait démissionner si le gouvernement était censuré, un peu plus de la moitié d’entre eux (53%) le considérant comme responsable de la situation politique actuelle.
Un climat de méfiance qui pousse Jean-François Copé à justifier un peu plus sa conviction : « Depuis six mois, c’est le désordre, on ne peut pas dire qu’on n’est pas prévenu. Chacun verra ce que ça veut dire que de voter RN (Rassemblement national, ndlr), de voter LFI (La France insoumise, ndlr) ou pour des partis de gouvernement. Ce n’est vraiment pas la même chanson. » « Maintenant, les Français sont alertés : où est le désordre et où est la sérénité ? », a-t-il fait mine de demander.
Quid dans ce tourbillon politique de Marine Le Pen ? Tandis que la chef de file des députés RN laisse entendre que ses troupes voteront la censure contre l’équipe de Michel Barnier, Jean-François Copé « ne comprend rien à sa stratégie. » « Si elle déstabilise le pays aujourd’hui, les gens vont le mettre à son débit. Tout son travail de respectabilité tombe en éclats parce qu’elle est prête à voter avec Mélenchon pour plomber le pays », a encore pointé le maire de Meaux.
Cet état de fait pousserait-il Emmanuel Macron à démissionner ? « Il n’y pense pas et ira jusqu’en 2027 », a avisé l’Élysée.
« LE SUJET NE SE POSE PAS »
Invité de RTL, jeudi 28 novembre, l’ancien ministre du Budget, actuel macroniste de l’Oise, Éric Woerth, a balayé la question d’un revers de la main. « Le sujet ne se pose pas. Le Président de la République a été élu pour cinq ans », a-t-il déclaré.
« Le Président a respecté une période de silence après la dissolution de l’Assemblée nationale, j’imagine qu’il reviendra plus directement dans les affaires nationales, en dehors de son agenda international », a-t-il ajouté.
Marie Le Pen serait-elle une option ? Impossible pour l’ex-président de la Commission des finances de l’Assemblée nationale, qui pointe du doigt un parti sans « ligne politique, en dehors de l’immigration ».
Pour rappel, le troisième alinéa de l’article 49 de la Constitution de la Cinquième République française, communément appelé 49.3 ou 49§3, permet au gouvernement d’engager sa responsabilité sur un texte de loi et, sauf adoption d’une motion de censure, d’obtenir son adoption par l’Assemblée nationale.
Robert Kongo, correspondant en France