En 1996, lorsque le Zaïre fut attaqué depuis l’Est du pays, l’armée et le gouvernement zaïrois nous avaient avertis qu’il s’agissait d’une agression orchestrée par le Rwanda. Cependant, aveuglés par notre hostilité envers Mobutu, nous avons refusé de les croire. Nous étions prêts à pactiser avec le diable, pourvu que le régime de Mobutu tombe.
À l’arrivée de l’Alliance des Forces Démocratiques pour la Libération du Congo (AFDL), notre armée, notre gouvernement et nos services de sécurité avaient déjà été infiltrés et largement contrôlés par les Rwandais. Ainsi, le grand Congo s’est transformé en une colonie du petit Rwanda.
Les sous-traitants congolais utilisés pour « congoliser » cette agression furent ensuite éliminés lorsqu’ils tentèrent de s’émanciper de leurs mentors. Ngandu Kisase, le tout premier chef désigné à la tête de l’AFDL par les agresseurs, en fut une des premières victimes.
Ngandu Kisase était un chef rebelle congolais, ayant pris part à la rébellion des Simba dans les années 1960 avant d’émigrer en Allemagne, où il vécut de nombreuses années. Dans les années 1990, il reprit les armes, recruté par l’Ouganda pour diriger le Conseil National de Résistance pour la Démocratie (CNRD), un mouvement intégré à l’insurrection militaire dans l’Est du pays.
Son CNRD faisait partie des mouvements rassemblés par les puissances étrangères pour former l’Alliance des Forces Démocratiques pour la Libération du Congo (AFDL). Cette alliance était dominée par les troupes des armées rwandaise et ougandaise, qui constituaient l’essentiel de ses forces militaires.
Nationaliste dans l’âme, André Ngandu Kisase, à l’approche de Goma, se démarqua de son rival Laurent-Désiré Kabila en exprimant son désir de s’affranchir de l’influence rwandaise. Contrairement à Kabila, il exigea le départ des militaires étrangers afin de permettre aux Congolais de gérer seuls la suite des opérations. Cette prise de position lui coûta la vie : il fut exécuté en brousse par l’armée rwandaise en 1997.
Laurent-Désiré Kabila, quant à lui, eut un parcours marqué par son engagement révolutionnaire. Après un passage éclair dans la gendarmerie katangaise en 1969, alors qu’il militait dans la jeunesse du parti Balubakat de Jason Sendwe, il rejoignit le Comité National de Libération (CNL), une organisation révolutionnaire opposée au gouvernement Adoula. Par la suite, il rallia les forces lumumbistes au sein de l’armée populaire de libération d’Albertville et établit son maquis autour de Hewa Bora, à Fizi, en collaboration avec des éléments rwandais et ougandais.
Après l’échec de son maquis, Kabila se retira en Tanzanie, où il s’adonna au trafic d’or. C’est de là qu’il fut recruté en 1996 pour participer à la création de l’Alliance des Forces Démocratiques pour la Libération du Congo (AFDL) à Gisenyi, au Rwanda, sous la bannière de son Parti de la Révolution Populaire (PRP).
Après l’assassinat de son rival André Ngandu Kisase, Laurent-Désiré Kabila resta à la tête de l’AFDL jusqu’à la chute de Mobutu et s’autoproclama président de la République à partir de Lubumbashi.
Quelques années après son installation à Kinshasa, il tenta lui aussi de s’émanciper de l’emprise de ses anciens alliés en exigeant le départ des troupes rwandaises. Cette volonté d’affranchissement ne fut pas du goût des puissances impérialistes qui auraient orchestré son assassinat, survenu le 16 janvier 2001, dans des circonstances qui demeurent floues à ce jour.
Déterminé à maintenir son emprise sur la RDC, à exploiter illégalement ses richesses, et avec pour objectif principal d’annexer le Kivu, le Rwanda continue de revendiquer l’appartenance de cette région stratégique. Pour parvenir à ses fins, il s’appuie sur des sous-traitants congolais, des compatriotes manipulés pour trahir leur propre patrie. Ces derniers ne risquent-ils pas de subir le même sort que ceux qui, par le passé, avaient trahi la mère patrie avant eux ?
Aujourd’hui, tous les Congolais ont pris conscience de la véritable ambition du Rwanda : coloniser le grand Congo, annexer le Kivu et, à partir de l’Est, tenter une fois encore de prendre le pouvoir à Kinshasa pour y installer d’autres valets. Cependant, cette mission est désormais vouée à l’échec. L’aventure du M23 et de l’AFC (Armée de la Coalition) n’a aucun avenir. Ceux qui envisagent de les rejoindre devraient y réfléchir à deux fois.
Il est temps de se ranger, en toute unité, derrière les Forces Armées de la République Démocratique du Congo (FARDC) et leur commandant suprême, pour barrer la route à toute forme d’agression rwandaise. Ce ne sont pas des “rebelles”, comme l’avaient souligné le général Eluki et le président Laurent-Désiré Kabila, mais des instruments d’une politique impérialiste visant à déstabiliser et à fragmenter la RDC.
Ensemble, dans un élan patriotique, nous devons défendre l’intégrité de notre territoire et l’avenir de notre nation.
Tribune de Stev Mbikayi,
Député National et Fondateur du Parti Travailliste.