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Kinshasa
26 janvier, 2025 - 08:56:25
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Conflit autour de la réhabilitation des routes : Stevens and Associates conteste la décision du ministre des ITPR

En novembre 2024, tout semblait prêt pour le démarrage du vaste projet de construction de 5284 km de routes porté par Stevens & Associates. Pourtant, des blocages financiers et des réaffectations inattendues d’axes routiers par le ministre des Infrastructures ont retardé les travaux. Entre la mobilisation des partenaires internationaux et les accusations de sabotages administratifs, l’entreprise réclame un arbitrage du chef de l’État pour remettre le projet sur les rails.

Interview avec Mme Solange Faida Ongagna, Chief Executive Office de Stevens&Associates

Avec les études de faisabilité dûment achevées, le projet de construction des infrastructures porté par Stevens and Associates était prévu pour démarrer en novembre 2024. Où en sommes-nous à ce jour ?
Je suis heureuse de vous retrouver en ce début d’année 2025, une année placée sous le signe des travaux. En novembre dernier, nous étions prêts à entamer les travaux de construction de nos routes nationales. Cependant, un problème majeur s’est posé avec nos partenaires financiers, qui ont relevé un souci de gestion financière en RDC. Ils ont refusé que les fonds soient directement transférés en RDC et nous ont imposé de passer par des banques situées en Tanzanie ou au Kenya pour accéder aux financements nécessaires à la réalisation de notre projet.
Cette situation a donc retardé le début des travaux. Conscients de la souffrance de notre population, nous nous sommes engagés à poursuivre nos efforts, car notre peuple a besoin d’infrastructures de qualité, comme cela se fait dans d’autres pays du monde. Les partenaires financiers ont maintenu leur exigence de passer par le Kenya ou la Tanzanie. Nous avons voyagé jusqu’en Californie avec des experts d’Equity Bank pour présenter le nouveau programme d’infrastructures du Chef de l’État, fondé sur un échange d’infrastructures contre des carrés miniers. Equity Bank a donné son accord de principe pour collaborer sur ce programme, ce qui a renforcé notre engagement.
Cependant, sur place, nous avons constaté qu’Equity RDC n’était pas informé de cette initiative, ce qui nous oblige à travailler exclusivement avec Equity Bank au Kenya ou en Tanzanie. Des pourparlers sont déjà en cours avec ces institutions. Par ailleurs, nous avons pris contact avec d’autres partenaires en Europe pour explorer les possibilités de rapatriement des fonds en RDC afin de lancer les travaux. Cela est d’autant plus urgent que nous sommes profondément préoccupés par la situation dramatique de la population, notamment dans l’Est du pays, avec la Nationale n°2, ainsi que dans la province de l’Équateur avec la Nationale n°5. .
Aujourd’hui, nous sommes à l’étape du transfert des fonds sous forme de monnaie électronique en billets de banque. Ensuite, nous aborderons le deuxième volet, à savoir l’exploration de l’offre du Chef de l’État pour la réalisation des infrastructures contre des carrés miniers.

Quelles sont les motivations qui sous-tendent votre engagement en faveur du développement de la République démocratique du Congo ?

Pour nous, développer ce pays est un devoir patriotique, une obligation, car nous n’avons que ce pays comme patrimoine et héritage à transmettre à nos enfants. Le devoir patriotique nous impose la volonté de nous battre pour ce qui est bénéfique à la nation. C’est toute la différence avec ces investisseurs qui viennent en RDC pour s’enrichir.

Votre projet ne consiste-t-il pas en la construction et la réhabilitation de 5 284 km de routes ?

Pour l’instant, un sérieux problème se pose : à notre retour des États-Unis, nous avons constaté que certains axes prévus dans notre projet ont été amputés par le ministre des Infrastructures et Travaux publics pour être réaffectés à un autre constructeur.

Que faut-il comprendre ? Le ministre des Infrastructures et Travaux publics ignore-t-il l’existence du protocole d’accord qui vous lie au gouvernement de la République, par l’intermédiaire de l’Office des routes ?

Le ministère dispose d’une copie de notre protocole d’accord. À maintes reprises, il m’a été demandé de me rendre dans ses bureaux pour signer le contrat définitif. Le ministre a traîné les pieds, sans motif apparent, mais je me rends compte maintenant que toutes ces manœuvres visaient à soustraire de notre projet certains axes routiers qui nous ont déjà été attribués et pour lesquels des études de faisabilité sont disponibles.
Selon les documents en notre possession, le ministre Gisaro a attribué ces axes routiers à l’entreprise Toha. Nous souhaitons savoir ce que cette entreprise a déjà réalisée dans ce pays. Pendant ce temps, chacun peut constater l’état lamentable des Routes nationales n°2, 5, 7, et bien d’autres.
Il est exaspérant de voir que, tandis que nous nous efforçons de rapatrier les fonds nécessaires à la réalisation du projet, le ministre se permet de réaffecter à une entreprise inconnue du public des axes routiers déjà intégrés dans un projet existant et dûment étudié. Dans quel intérêt le ministre Gisaro agit-il de la sorte, alors que le pays est immense et que de nombreux autres axes routiers nécessitent une réhabilitation urgente ?
Stevens and Associates est venu pour construire des infrastructures dont le peuple a besoin. Nous sommes résolument engagés à soutenir la vision du chef de l’État, notamment dans son volet consacré à la modernisation des routes en RDC.
Cela est inacceptable. Le chef de l’État doit impérativement rappeler à l’ordre le ministre des Infrastructures, qui risque de nuire à la réalisation des objectifs nationaux par des agissements de ce genre.
Qui est à l’origine de l’attribution de certains de vos axes routiers à l’entreprise Toha ?
C’est le ministre des Infrastructures, alors que nous avons un protocole d’accord en cours d’exécution. À quoi bon rédiger un protocole d’accord avec un groupement d’entreprises américaines, dont le sérieux n’est plus à démontrer, si l’on sait d’avance qu’il peut être piétiné à tout moment ? J’ai mis 12 mois, avec 52 voyages entre la Californie et Kinshasa, pour obtenir le protocole d’accord le 11 juin 2024. Et c’est le ministre de l’ITPR qui a bloqué le mécanisme pour empêcher la signature du contrat définitif à ce jour.

Maintenant que certains de vos axes routiers ont été réaffectés à l’entreprise Toha, quelles sont vos prochaines démarches ?

Pour nous, les engagements pris par le ministre des ITPR avec Toha ne nous concernent pas, car nous restons fidèles au protocole d’accord signé avec le gouvernement via l’Office des routes. Les axes routiers qui ont été mis à notre disposition relèvent de la gestion de l’Office des routes. Nous ne nous laisserons pas déranger par les manipulations du ministre Gisaro. Entre-temps, le ministre de l’ITPR a demandé à Toha de débuter les travaux le 15 janvier 2025.
En dépit de ces manipulations du ministre des ITPR, nous possédons un document qui nous confère le droit d’engager les travaux, et le peuple a droit à un travail bien fait. Les Chinois sont impliqués dans l’exploitation illégale des minéraux, mais nous sommes là pour construire des infrastructures avec une garantie de 100 ans. Nous avons fait des progrès significatifs dans nos engagements : nous avons mené des études de faisabilité, avons visité le terrain, et exigeons simplement qu’on nous donne l’occasion de réaliser ce qui est dans l’intérêt de la population, conformément à la vision du chef de l’Etat.
Il serait d’ailleurs pertinent d’interroger les intentions du ministre des ITPR, car ses actions semblent s’inscrire dans un projet de balkanisation du pays, en introduisant des entreprises douteuses et sans expérience.

Si la situation revient à la normale et que le chef de l’État rend un arbitrage favorable à votre égard, quand envisagez-vous de commencer les travaux ?

Nous prévoyons de commencer en février prochain, car nous devons retourner dans l’Est du pays pour évaluer l’état actuel de la route que nous avions visitée pendant la saison sèche. Avec le retour des pluies, la voie s’est considérablement dégradée. Il y a donc beaucoup de travail à accomplir : nous devons construire des murs de soutènement pour retenir le sol et créer un système de canalisations pour récupérer l’eau de montagne, provoquée par l’exploitation illégale des minéraux par les Chinois. Avec tous les dégâts qu’ils causent, cela ne suffit pas ; il faut encore y ajouter des mesures supplémentaires. En plus du pillage de nos minéraux, ils abusent de nos mineures, et des photos obscènes circulent à travers le monde, illustrant cette dépravation des mœurs orchestrée par des Chinois qui, avec leur richesse, parviennent même à corrompre les représentants des forces de l’ ordre. Cela fait 15 ans que ces Chinois sont présents ici, mais on ne voit aucune empreinte véritable de leur passage.

Quel message souhaitez-vous adresser au chef de l’État, sous la vision dont vous vous engagez à réaliser ce projet d’infrastructures ?
Stevens & Associates est en RDC pour accompagner la vision du chef de l’État dans son volet de modernisation des infrastructures de la RDC, à commencer par les routes par lesquelles passera le développement du pays. En tant que garant de la nation, le chef de l’État devra jouer son rôle d’arbitre et nous départager avec le ministre des ITPR, qui chasse les investisseurs venus prêter main-forte au gouvernement. Et je reste convaincue que cet homme ne travaille pas pour les intérêts de la République, et je le dis avec conviction, car je ne vois pas pourquoi il a bloqué notre contrat juste pour introduire Toha dans les 5284 km qui sont déjà attribués.
En superposant des contrats, le ministre de l’ITPR dessert la République, comme c’est le cas avec l’aéroport de N’Djili. De cette façon, on bloque la République pour qu’il n’y ait pas de construction. Car nous ne nous sommes pas engagés jusqu’à mobiliser nos ressources pour que Toha vienne ramasser.
Le chef de l’État doit s’impliquer à fond dans ce dossier, car je suis d’avis que beaucoup de ses ministres ne partagent pas sa vision. À l’instar du ministre des Infrastructures et Travaux publics, il doit être mis hors d’état de nuire, car il présente des symptômes d’un ennemi de la République.

Propos recueillis par St Augustin K.

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