Cent jours ne suffisent pas à pacifier une province rongée par des années de guerre, mais ils dessinent les contours d’une méthode. En se livrant à l’exercice du bilan depuis Beni, le gouverneur Kalule Somo entend démontrer que l’autorité de l’État n’est pas une formule vaine mais une reconquête de chaque instant, sur les fronts militaires comme dans la gestion civile. À la tête d’un exécutif militarisé, le général-major affiche une volonté de fermeté et de proximité, dans une région où chaque déplacement de l’autorité rappelle que la paix reste, encore, un horizon lointain.
Depuis Beni, chef-lieu provisoire de la province, le général-major Evariste Kalule Somo a choisi, samedi 10 mai, d’effectuer un exercice attendu : celui du bilan. Cent jours après sa nomination à la tête du Nord-Kivu, alors que la province reste en proie à des affrontements avec les rebelles du M23 soutenus par le Rwanda, le gouverneur a tenu à dresser un état des lieux de son action, insistant sur la volonté de son administration d’« inverser le rapport de force sur le terrain ».
Entouré de ses collaborateurs les plus proches, le gouverneur s’est adressé à la presse provinciale et nationale. Dans une région fragmentée par des lignes de front mouvantes, cette conférence de presse se voulait à la fois un acte de transparence politique et une manifestation de fermeté. C’est Mme Prisca Kamala, coordinatrice en charge de la santé, de l’éducation, de la communication et porte-parole du gouvernement provincial, qui a exposé les grandes lignes de ce bilan.
« Le gouvernement provincial ne ménage aucun effort pour reprendre les entités occupées par les rebelles AFC-M23. Le front est actif sur toutes les lignes, tant sur le plan militaire que diplomatique », a-t-elle déclaré, rappelant la double stratégie engagée par les autorités : pression militaire sur le terrain et relance des échanges avec les pays de la région des Grands Lacs.
Une présence renforcée dans les zones sensibles
Au cours de ses 100 premiers jours, le général Kalule Somo a multiplié les déplacements dans les territoires de Beni, Masisi et Rutshuru — autant de bastions de tensions sécuritaires où les incursions rebelles se poursuivent, parfois au mépris des lignes rouges fixées dans les accords régionaux.
Selon la cellule de communication du gouvernorat, ces visites ont permis de « renforcer le contact avec les populations locales, de rétablir la chaîne de commandement administrative et d’identifier les urgences humanitaires sur le terrain ». La coordination avec les Forces armées de la République démocratique du Congo (FARDC) a, elle aussi, été consolidée, dans le cadre des opérations dites « de reconquête ».
Des échanges diplomatiques auraient par ailleurs été amorcés avec les pays membres de la Communauté d’Afrique de l’Est (EAC), bien que les résultats concrets tardent encore à se matérialiser. La province reste, de facto, dans un état de siège prolongé depuis mai 2021, avec un exécutif entièrement militarisé.
Appel à l’unité et promesse de transparence
Au-delà du volet sécuritaire, la porte-parole du gouvernement a tenu à rappeler l’importance du soutien populaire dans la quête d’une paix durable : « Nous avons besoin de l’accompagnement de toute la population pour reconquérir les zones occupées et restaurer durablement la paix sur l’ensemble du territoire provincial. »
Les autorités annoncent par ailleurs la publication imminente d’un rapport détaillé sur les actions entreprises dans les secteurs clés : infrastructures, santé, éducation, et assistance humanitaire. L’objectif affiché est de documenter les progrès accomplis — malgré les contraintes liées au conflit — et d’en rendre compte aux citoyens.
Justin Mupanya, correspondant à Beni