En immersion sur le terrain, le ministre d’État à la Justice, Guillaume Ngefa, poursuit sa tournée dans les juridictions de Kinshasa. Après plusieurs années de fonctionnement difficile, marquées par le manque d’infrastructures et de moyens, juges et magistrats ont saisi cette occasion pour dresser un tableau sans fard de leurs conditions de travail. Du tribunal de paix de Lemba à la cour d’appel de Kinshasa/Matete, en passant par le tribunal pour enfants, le garde des Sceaux a recueilli doléances, frustrations mais aussi des signes d’engagement et de résilience. Face à des magistrats déterminés malgré la précarité, Guillaume Ngefa a promis des solutions concrètes, notamment sur la question des bâtiments judiciaires, du renforcement du personnel et de la lutte contre le phénomène des “foliomen”, ces escrocs du foncier qui ternissent l’image de la justice congolaise.
Le ministre d’État en charge de la Justice, Guillaume Ngefa, a entamé lundi 3 novembre la deuxième étape de sa tournée dans les juridictions et services judiciaires de Kinshasa, capitale de la République démocratique du Congo. Cette descente sur le terrain, amorcée au tribunal de paix de Lemba, s’inscrit dans la volonté du gouvernement de mesurer concrètement les réalités du système judiciaire congolais et d’y apporter des réponses adaptées.
Partout, les magistrats ont dressé le même constat : conditions de travail précaires, effectifs insuffisants et locaux vétustes. À l’auditorat militaire supérieur de Kinshasa/Matete, l’auditeur Tom Mutombo a interpellé le ministre : « Placez-nous dans des conditions qui nous permettent de faire le travail. Depuis que nous sommes là, nous nous battons nous-mêmes pour travailler. Les moyens ne suivent pas. » Une requête entendue par le ministre, qui a promis d’y remédier : « La question du terrain pour l’érection des bâtiments de l’auditorat militaire supérieur et de garnison de Kinshasa Matete fera l’objet de discussions avec le ministre des Affaires foncières », a assuré Guillaume Ngefa.
Entre pénurie de juges et lutte contre les dérives foncières
Au tribunal pour enfants de Kinshasa/Matete, la présidente Lydie Fataki a alerté sur la fragilité du dispositif judiciaire : « Nous ne sommes que quatre juges. Quand l’un tombe malade, il est impossible de siéger, surtout en appel. Nous recevons entre 30 et 40 dossiers par mois. » Pire encore, la prise en charge des enfants en conflit avec la loi repose sur les moyens personnels du personnel.
À la cour d’appel de Kinshasa/Matete, le premier président Jean Kabangu Tshondo a, pour sa part, salué la démarche du ministre avant de plaider pour la restauration de la dignité de la justice. « Avec les moyens du bord, nous avons construit une salle d’audience, une chambre disciplinaire et une bibliothèque. Nous comptons désormais bâtir des cabinets pour les magistrats. »
Mais le magistrat en chef a également insisté sur la nécessité d’une réforme législative pour lutter contre le phénomène dit des foliomen, ces escrocs spécialisés dans la falsification des titres fonciers. « Je sollicite que vous puissiez présenter une loi au Parlement pour que les conservateurs fonciers répondent aussi de leurs actes. Les maux de la justice ne viennent pas seulement des magistrats. »
Vers une justice de proximité et de confiance
Le ministre Guillaume Ngefa a salué cette lucidité et promis une action vigoureuse contre les pratiques qui gangrènent le secteur. « Vous venez de toucher un problème qui me tient à cœur : le phénomène foliomen. Nous voulons que ce fléau soit éradiqué. »
Selon Willy Ndjoko, procureur général près la cour d’appel de Kinshasa/Matete, cinq avocats sont déjà en détention pour leur implication dans ces fraudes foncières. Malgré un manque criant d’effectifs, il faudrait 22 magistrats supplémentaires pour atteindre le nombre requis de 50, la justice locale se montre résolument engagée dans la lutte contre l’impunité.
Dans la foulée, Guillaume Ngefa a salué « le courage et la détermination de ceux qui font vivre la justice au quotidien malgré les contraintes ». Pour le ministre, cette tournée n’est pas seulement un constat, mais le point de départ d’un redressement annoncé : celui d’une justice congolaise plus proche des citoyens, plus équitable et plus respectée.
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