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14 novembre, 2024 - 05:28:58
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Sommet des BRICS de Kazan 2024 : Quelques leçons pour l’Afrique et la RDC

La Fédération de Russie a abrité durant trois jours le Sommet des BRICS qui a abouti à une Déclaration finale de 32 pages en 134 points. Cette rencontre exceptionnelle qui a réuni une trentaine de Chefs d’Etats et de Gouvernement, sous le thème “Renforcer le multilatéralisme pour un développement et une sécurité mondiales justes”, s’est déroulée du 24 au 27 octobre 2024 à Kazan – la capitale de la République du Tatarstan1 , une république de la Fédération de Russie située en Europe de l’Est, qui fait partie du district fédéral de la Volga, un important centre culturel de Russie. La principale source de richesse de la région est le pétrole, avec une forte industrie pétrochimique. Aux cinq membres historiques du Groupe (Brésil, Inde, Russie, Chine et Afrique du Sud), se sont joints cette année quatre nouveaux membres dont l’adhésion avait été cooptées lors du Sommet de Johannesburg, en Afrique du Sud, du 22 au 24 août 2023 pour le XVe Sommet des BRICS. Il s’agit de l’Égypte, l’Éthiopie, l’Iran et les Émirats arabes unis2 . Plusieurs invités extérieurs, parmi lesquels des chefs d’Etats et de Gouvernements d’Afrique, d’Asie et d’Amérique latine ont également pris part à ce sommet.

Il faut également souligner la présence remarquable du Secrétaire Général des Nations-Unies, Antonio Guterres. Pour plusieurs observateurs de la scène internationale et particulièrement les commentateurs russes, il s’est agi du « plus important événement diplomatique organisé par la Fédération de Russie depuis la Seconde Guerre mondiale ».

  1. Quels sont les objectifs des pays du Groupe des BRICS ?

Les pays du Groupe des BRICS, que nous appellerons de manière brève les « BRICS », ont été créés pour trouver des moyens de réformer les institutions financières internationales telles que le FMI et la Banque mondiale, afin de permettre aux économies émergentes de mieux commercer entre elles, de se faire entendre et d’être mieux représentées sur la scène internationale. Le groupe, originellement économique, avait pour objectif de contester l’hégémonie des puissances occidentales et notamment celle des États-Unis, dont le dollar domine le commerce mondial. D’une manière générale, les BRICS sont l’une des instances promouvant une reconnaissance de la multipolarité des équilibres économiques et politiques mondiaux, en rupture avec les organisations héritées de l’après Seconde guerre mondiale. De ce qui précède on peut souligner quelques-uns des principaux objectifs des BRICS suivants :

1.1. Coopération économique : encourager le commerce, la coopération et la croissance entre les membres, ainsi qu’améliorer l’accès des économies des BRICS aux marchés ;

1.2. Financement du développement : Créer des institutions telles que la CRA3 et la NDB4 pour financer des projets d’infrastructure et de développement dans les pays membres ;

1.3. Coordination politique : Renforcer le discours politique et la coordination sur les questions internationales, notamment en modifiant les institutions de la gouvernance mondiale pour tenir compte de l’évolution du paysage économique mondial et pour donner aux économies émergentes une voix et une représentation plus fortes ;

1.4. Échanges sociaux et culturels : Promouvoir les relations interpersonnelles et le respect mutuel des cultures tout en stimulant les échanges sociaux et culturels entre les nations membres ;

1.5. Technologie et innovation : Renforcer la collaboration internationale dans les domaines de la science, de la technologie et de l’innovation afin de promouvoir l’échange de connaissances, le renforcement des capacités et les avancées technologiques entre les nations membres ;

1.6. Le développement durable : Promouvoir des méthodes de développement durables et respectueuses de l’environnement tout en collaborant à la réalisation des objectifs de développement durable ;

1.7. Paix et sécurité : Promouvoir la paix, la stabilité et la sécurité au niveau local et international, tout en s’attaquant aux problèmes et aux risques communs en matière de sécurité, tels que le terrorisme.

1.8. Coopération Sud-Sud : Renforcer la coopération et la collaboration entre les pays en développement, partager les meilleures pratiques et soutenir les initiatives qui contribuent au développement global du Sud.

  1. Brève historique des Sommets des BRICS :

Le groupe des BRICS compte au départ quatre pays faisant partie des dix premières puissances économiques mondiales : Brésil, Russie, Inde et enfin la Chine, future initiatrice de nouvelles routes commerciales, communément appelée « Route de la soie ».

➢ Le premier sommet des quatre pays BRIC a lieu le 16 juin 2009, à Ekaterinbourg, une ville de la région de l’Oural en Fédération de Russie ;

➢ Le second se tient le 16 avril 2010, à Brasilia, au Brésil. Les deux premières rencontres témoignent d’une institutionnalisation des sommets du BRIC et participent ainsi à la formation d’une « nouvelle réalité géopolitique »6 ;

➢ Le 14 avril 2011, le troisième sommet a lieu à Sanya (Hainan), en Chine. Il est le premier sommet des BRICS, avec l’adhésion officielle de l’Afrique du Sud, qui fait de facto disparaître le « Triangle Brésil – Inde – Afrique du Sud »7 ;

➢ Le quatrième sommet des BRICS a lieu le 29 mars 2012 à New Delhi, en Inde ;

➢ Le cinquième sommet des pays BRICS a lieu le 28 mars 2013 à Durban, en Afrique du Sud. À la suite de ce sommet, la Chine lance en septembre 2013 son initiative BRI (Belt and Road Initiative)8 , un projet international de Nouvelle route de la soie ;

➢ Le sixième sommet des pays BRICS a lieu le 17 juillet 2014 à Fortaleza, au Brésil ;

➢ En 2015, ont lieu le septième sommet des pays du BRICS à Oufa, en Russie, ainsi que l’inauguration officielle de la Nouvelle Banque de Développement (NDB), institution conçue comme une alternative à la Banque mondiale soupçonnée d’être trop entre les mains des Occidentaux ;

➢ En 2016, les dirigeants du BRICS, Michel Temer, Vladimir Poutine, Narendra Modi, Xi Jinping, et Jacob Zuma se réunissent à Hangzhou en Chine où ils disposent dorénavant de leur propre banque de développement avec son nouveau siège établi à Shanghai ;

➢ Le 4 septembre 2017, le sommet annuel se tient à Xiamen, en Chine. Ces cinq BRICS sont rejoints par la Thaïlande, le Mexique, l’Égypte, la Guinée et le Tadjikistan en tant que pays observateurs, pour discuter d’un plan « BRICS Plus » (ou « BRICS+ ») prévoyant l’élargissement éventuel du groupe de 2009 ;

➢ Du 25 au 27 juillet 2018, les dirigeants des BRICS tiennent leur dixième sommet à Johannesburg pour mettre en place une coopération économique accrue dans un environnement économique international en pleine mutation. La Turquie y est aussi invitée en tant que présidente de l’Organisation de coopération islamique9 ;

➢ Pour le 11e sommet BRICS du 14 novembre 2019 à Brasilia, le communiqué final annonce : « Nous restons attachés au multilatéralisme et à la coopération des États souverains afin de maintenir la paix et la sécurité ». Il laisse transparaître la volonté des BRICS de lutter pour un multilatéralisme « renforcé et réformé » et « plus ouvert ». Et pour le président brésilien Bolsonaro, la Chine, qui est déjà premier partenaire commercial de Brasilia, fait « de plus en plus partie de l’avenir » de son pays10 ;

➢ Le 17 novembre 2020, le 12e sommet des BRICS se tient sous forme de visioconférence ;

➢ Le 9 septembre 2021, le 13e sommet des BRICS se tient par visioconférence. Dans un contexte de pandémie de Covid-19, la « Déclaration de New Delhi » publiée à l’issue du sommet des BRICS stipule : « Nous regrettons l’inégalité flagrante dans l’accès aux vaccins, aux diagnostics et aux traitements, en particulier pour les populations les plus pauvres et les plus vulnérables du monde » ;

➢ Le 23 juin 2022 se déroule le 14e sommet des pays membres des BRICS – Brésil, Russie, Inde, Chine et Afrique du Sud – en format virtuel, sous la présidence du Président de la République Populaire de Chine Xi Jinping. Sous le coup des sanctions occidentales depuis plusieurs mois, la Russie va jouer la carte du « découplage » avec l’Occident et prolonger son effort de rapprochement avec la Chine ;

➢ Le 15e sommet des BRICS se tient du 22 au 24 août 2023 à Johannesburg en Afrique du Sud. Les pays membres s’y accordent sur le principe d’une expansion comprenant six pays pouvant rejoindre le groupe au 1er janvier 2024 : l’Iran, l’Égypte, l’Éthiopie, les Émirats arabes unis, l’Arabie saoudite et l’Argentine

III. Les leçons du Sommet de KAZAN (en Fédération de Russie):

3.1. La Russie n’est pas isolée :

Le sommet des BRICS+ à Kazan a démontré, s’il en était encore besoin, que la Russie n’est pas aussi isolée qu’on le prétend en Occident. 32 pays ont été présents au sommet de Kazan, dont 24 chefs d’États et de Gouvernements, tandis qu’une trentaine de pays sont intéressés par une coopération avec les BRICS+. La Russie et l’Occident se sont isolés mutuellement. La Russie a non seulement maintenu ses relations avec le reste du monde, mais elle cherche depuis février 2022 à les développer et les structurer, notamment autour de grands rendez-vous. On l’a constaté lors du dernier sommet Russie-Afrique en 2023, et lors du forum économique RussieMonde islamique qui s’est tenu aussi à Kazan en mai dernier. On devrait également le voir le mois prochain à Sotchi lors de la première réunion des ministres des Affaires étrangères du Forum Russie-Afrique. De plus, le sommet de Kazan est surtout révélateur de l’évolution des rapports entre Moscou et ce que les Russes appellent la « Majorité mondiale ». Ce concept, qui a émergé au cours des années 2022-2023 dans la production académique en Russie, est repris par les officiels russes qui l’opposent volontiers à un autre concept en vogue depuis plusieurs années, celui d’« Occident collectif »14. Ce sommet a permis des rencontres avec les nombreux invités extérieurs aux BRICS – dont le président turc M. Erdogan et une vingtaine de Chefs d’État et de Gouvernement d’Afrique, d’Asie et d’Amérique latine, ainsi que le Secrétaire Général des Nations-Unies. C’est donc un évènement diplomatique international majeur qui s’est tenu sur le sol russe en dépit de la rhétorique occidentale antirusse.

3.2. Le désir de la paix dans le monde :

Les participants ont exprimé leur préoccupation sur l’escalade de la violence et la persistance des conflits armés en différents points de la planète, à commencer par ceux qui ont un impact considérable à l’échelle régionale ou internationale. Ils ont réaffirmé leur engagement en faveur du règlement pacifique des différends par le biais de la diplomatie, de la médiation, du dialogue inclusif et des consultations sur la base de la coordination et de la coopération, et ont tous soutenus les efforts allant dans le sens d’une régulation pacifique des crises. Ils ont souligné la nécessité de contribuer aux efforts de prévention des conflits, notamment en s’attaquant à leurs causes profondes. Ils ont reconnu la légitimité et le bien-fondé des préoccupations de tous les pays en matière de sécurité. Ils ont appelé à la protection du patrimoine culturel, en particulier dans les régions touchées par des conflits, afin de prévenir la destruction et le trafic illicite des biens culturels, qui ont une signification vitale pour la préservation de l’histoire et de l’identité des communautés affectées par les conflits. La plupart des leaders et de personnalités invitées au sommet, en arrivant à Kazan, ont lancé des appels à la paix, au Proche-Orient et en Ukraine. C’est le cas notamment du Président de la République Populaire de Chine, Xi Jinping, qui a été le plus précis sur l’Ukraine en demandant qu’il n’y ait “pas d’extension géographique, pas d’escalade, pas de provocation”

3.3. Plusieurs pays veulent rejoindre les BRICS :

Plusieurs pays ont manifesté le désir de rejoindre les BRICS. Ce qui confirme que les objectifs et le mode de fonctionnement des BRICS attirent l’attention de la plupart des pays du « Sud Global » ; On se bouscule au portillon – une trentaine de candidats – comme le montre notamment la candidature de la Turquie de M. Erdogan, présent au sommet de Kazan et celle de partenaires proches des États-Unis comme la Thaïlande, le Mexique ou l’Indonésie.

3.4. Un rôle accru pour les femmes :

 

Les participants ont insisté sur le rôle des femmes, rejoignant en cela la rhétorique onusienne sur la question.

3.5. Une alternative au Dollar :

À défaut de pouvoir détrôner l’hégémonie du dollar, les participants réfléchissent à la mise en place d’un système d’échange bancaire alternatif au système “swift” qui pourrait s’appeler “BRICS Bridge”. De même, l’accent mis sur l’option des échanges en monnaies nationales des pays concernées sera complété par un dialogue renforcé sur le plan financier. L’idée d’une monnaie commune aux BRICS reste manifestement un outil de communication plus qu’un projet, et ses chances de concrétisation sont nulles. Restent cinq axes de travail complémentaires que sont la diversification des réserves de change, les transactions bilatérales en monnaies locales, les actifs internationaux en monnaies locales, la dédollarisation progressive des marchés d’énergie et de matières premières et l’internationalisation du yuan.

3.6. Un monde guide par la multipolarité :

Les participants ont reconnu l’émergence de nouveaux centres de puissance, de prise de décision politique et de croissance économique. Cette émergence est susceptible d’ouvrir la voie à un ordre mondial multipolaire plus juste, démocratique et équilibré. La multipolarité peut offrir aux pays en développement et aux économies émergentes l’opportunité de révéler leur potentiel constructif tout en bénéficiant d’une mondialisation économique inclusive et juste, ainsi que d’une coopération profitable à tous. En conservant à l’esprit la nécessité de mieux adapter l’architecture actuelle des relations internationales aux nouvelles réalités. Ils ont réaffirmé leur engagement en faveur du multilatéralisme, du respect du droit international — à commencer par sa pierre de touche que sont les objectifs et principes inscrits dans la Charte des Nations Unis — ainsi qu’en faveur d’une centralité préservée de l’ONU dans le système international, au sein duquel les États souverains coopèrent dans l’intérêt du maintien de la paix et de la sécurité internationales, de la promotion du développement durable, de la protection et du renforcement de la démocratie, des droits humains et des libertés fondamentales pour tous, mais aussi de la coopération fondée sur la solidarité, le respect mutuel, la justice et l’égalité.

3.7. Réforme du Conseil de Sécurité :

Prenant acte de la Déclaration de Johannesburg de 2023, les participants ont réaffirmé leur soutien à une réforme de fond des Nations Unies, et notamment de son Conseil de Sécurité, tendant à en renforcer le caractère démocratique et représentatif, l’efficacité et l’opérationnalité, et d’accroître la représentation des pays en développement dans toutes les catégories des membres du Conseil afin qu’il soit en mesure de répondre de manière adéquate aux défis mondiaux les plus pressants. Les BRICS soutiennent les aspirations légitimes des pays en développement d’Afrique, d’Asie et d’Amérique Latine, y compris les États des BRICS, à jouer un rôle plus important dans les affaires internationales, en particulier à l’ONU et au sein de son Conseil de Sécurité. Ils reconnaissent comme légitimes les aspirations des pays africains exprimées dans le Consensus d’Ezulwini20 et la Déclaration de Syrte21 . Le communiqué de Kazan souligne de nouveau la nécessité d’une réforme du Conseil. Concernant cette institution, les Russes ont pu constater, par exemple au cours des différents votes intervenus au Conseil de sécurité des Nations unies depuis février 2022 au sujet de l’Ukraine, que les pays dits du « Sud global » ont tenu à conserver leur distance à l’égard de ce conflit. Les prises de position des capitales africaines, asiatiques, moyen-orientales et sudaméricaines sur la crise ukrainienne sont empreintes de nuance, ce que le Kremlin a tendance à considérer comme un actif de sa politique étrangère.

3.8. Collaboration dans le domaine énergétique :

Concernant l’énergie nucléaire, une “plateforme” sur ce sujet, pour le plus grand profit de ROSATOM, réunit la Russie, la Chine, l’Afrique du Sud, le Brésil, l’Iran l’Éthiopie et la Bolivie ; le Russie et la Chine consolident ainsi leur position dans un ensemble de pays qui représentent une bonne partie du marché mondial de l’énergie nucléaire dans les prochaines années. L’admission de l’Arabie saoudite, de l’Iran et des Émirats arabes unis reflète la diplomatie énergétique de l’Inde et de la Chine au Moyen-Orient, qui a favorisé l’établissement de liens étroits avec ces trois pays du golfe Persique. Avec la Russie et le Brésil, qui comptent également parmi les plus grands producteurs de combustibles fossiles au monde, le bloc des BRICS est bien placé pour devenir une force puissante sur le marché mondial du pétrole et du gaz s’il est capable de coordonner ses politiques.

3.9. Condamnation de la politique des sanctions occidentales :

Un autre élément fort de l’approche des BRICS réside dans la condamnation, à deux reprises d’ailleurs (paragraphe 10 et paragraphe 22), de la politique des sanctions occidentales. Les participants se sont dit profondément préoccupés par l’impact négatif des mesures coercitives unilatérales et illégitimes, dont les sanctions illégales, sur l’économie mondiale, le commerce international et la mise en œuvre des objectifs de développement durable. Ces mesures remettent en cause la Charte des Nations Unies, le système commercial multilatéral, le développement durable et les accords environnementaux. Ils affectent de manière négative la croissance économique, l’énergie, la santé et la sécurité alimentaire, accroissant la pauvreté et les défis environnementaux. Ils ont réaffirmé que les mesures coercitives unilatérales, notamment sous la forme de sanctions économiques unilatérales et de sanctions secondaires contraires au droit international, ont d’importants effets néfastes du point de vue des droits humains, dont le droit au développement, pour l’ensemble des populations des États visés, affectant de manière disproportionnée les couches les plus pauvres et les personnes en situation de vulnérabilité. Nous appelons en conséquence à la suppression de ces mesures.

3.10. Lutte contre la désinformation :

Les participants ont exprimé leurs vives inquiétudes quant à la croissance exponentielle et à la prolifération de désinformation et de mésinformation, sous la forme d’annonces erronées et de fake news, ainsi que de discours de haine, tout particulièrement sur les plateformes numériques, qui favorisent la radicalisation et l’émergence de conflits. Tout en réaffirmant leur attachement à la souveraineté des États, ils ont souligné qu’il est crucial d’assurer l’intégrité de l’information, sa libre circulation et l’accès libre à une information fiable et fondée sur des faits, notamment en promouvant la liberté d’expression et d’opinion ainsi que l’éducation numérique et médiatique, en vue de créer les conditions propices à des interactions propices à l’échange, dans la conformité des dispositions applicables du droit national et international.

  1. Intérêt des BRICS en Afrique

Les BRICS, qui ont le format d’un groupe qui ne s’immisce pas dans les affaires de ses membres et leur apporte des avantages mutuels, attirent à nouveau l’intérêt des pays en développement du monde entier, y compris de l’Afrique. L’Egypte et l’Ethiopie ont participé au sommet de Kazan comme membre à part entière. Plusieurs autres pays africains ont demandé à devenir membres des BRICS. La participation de plus de trente Chefs d’Etats et de Gouvernement en tant qu’invités au Sommet de Kazan témoigne de l’intérêt que la plupart des Etats du « Sud Global »porte aux BRICS et les opportunités économiques qu’ils offrent. Les dirigeants des BRICS ont donné la priorité à l’Égypte, en raison de sa position géostratégique sur les routes commerciales, de son nombre de marché et de ses gisements de pétrole et de gaz en Méditerranée orientale. En Afrique subsaharienne, les dirigeants des BRICS ont préféré l’Éthiopie, centre de l’Union africaine, au Nigeria, le plus grand pays d’Afrique. L’Éthiopie est la plus petite économie des BRICS élargis malgré sa population de plus de 120 millions d’habitants. Toutefois, selon les prévisions du Fonds monétaire international (FMI), son PIB devrait atteindre 156 milliards de dollars en 2023, avec une croissance de plus de 20 %.

  1. BRICS et Perspective des relations russo – congolaises :

L’Europe institutionnelle est dans une crise qui va s’aggraver et se généraliser, du fait des contradictions qui la minent et qui s’illustrent actuellement par les belliqueuses positions absurdes qu’elle prend au sujet des conflits qui déchirent la planète et qui ont de manière générale comme conséquence son propre affaiblissement. La prospérité qu’elle avait bâti sur l’exploitation de ses colonies la hante encore au point que sa volonté de recolonisation la conduit à travailler, en sous-main, à l’affaiblissement des structures nationales africaines pour leur substituer des constructions multilatérales de gestions de crises (G5 sahel et autres organismes) qu’elle finance sous condition et au gré de ses humeurs.

La République Démocratique du Congo, qui fait les frais depuis de nombreuses années de l’appétit des grands groupes multinationaux occidentaux, a besoin de paix et de stabilité. Le partenariat voulu avec la Russie (dont notamment l’accord de coopération militaire et technique ratifié en juin 2018 par le parlement congolais, le Mémorandum de coopération signé à Sotchi en 2019 entre le Premier Directeur Général adjoint des chemins de fer russes, Alexander MISHARIN, et le Ministre des transports et des communications de la République Démocratique du Congo, Didier MAZENGU MUKANZU ;sans oublier l’accord de coopération signé avec Rospotrebnadzor dans le domaine de l’épidémiologie et de la prévention des maladies infectieuses avec par Ministère de la Santé de la République Démocratique du Congo) devrait être complété par une coopération économique active et entrainer à ce qu’un traitement particulier lui soit réservé en ce qui concerne les moyens, humains, matériels et financiers qui devraient être engagés pour sa matérialisation. Faute de quoi, la RDC se contentera de regarder les autres pays africains, dont ses neufs voisins, avancer et profiter des bonnes dispositions de la Russie et des BRICS à les accompagner dans leurs projets de développement.

L’occident qui courtise l’Afrique aujourd’hui est celui des grands groupes multinationaux qui n’ont que leurs bénéfices comme centres d’intérêts et l’exploitation à moindre frais des ressources naturelles de nos pays, peu importe l’impact négatif que peuvent avoir leurs activités sur le sol africains. Conscient de cette réalité, plusieurs pays africains ont choisi de se tourner vers d’autres partenaires fiables, dont les BRICS au nombre desquels la Russie figure en bonne place. C’est le sens qu’il faut donner au souhait de plusieurs pays de rejoindre les BRICS. Dans les faits nous observons la présence sur le continent africain de plusieurs entreprises de la Fédération de Russie qui donnent entière satisfaction à leurs partenaires africains, dans tous les secteurs.

Au cours des deux Sommets Russie-Afrique et des Forum Economiques qui se sont tenus respectivement à Sotchi en octobre 2019 et à Saint-Pétersbourg en juillet 2023, l’ensemble des Représentations Diplomatiques Africaines à Moscou, ainsi qu’une centaine d’entreprises russes de tous les secteurs ont pu travailler à définir les conditions d’un partenariat concret entre la Russie et les pays africains. Les participants ont fait part des exemples positifs du travail des sociétés russes sur les marchés africains. Ils ont parlé des barrières existantes pour le développement de la coopération, examiné les mécanismes existants du maintien par l’Etat du business russe dans les pays de l’Afrique subsaharienne, élaboré des propositions visant à élargir les liaisons d’affaires et à renforcer le partenariat entre l’Etat et les structures privées sur le continent. Ils ont discuté des possibilités et opportunités présentées par les marchés africains en développement. Ils ont défini les approches du développement de la coopération russo-africaine. Plusieurs accords de coopération ont été signés dans tous les domaines dans une approche gagnant-gagnant.

La Russie coopère non seulement avec les pays africains individuellement, mais également à travers les BRICS. Elle collabore aussi avec les ensembles régionaux et sous régionaux, comme l’Union Africaine, la SADC, etc.

« La page des années libérales pro-occidentales étant, heureusement, en bonne partie tournée, l’heure est au renouveau des relations. Si l’espace eurasiatique, ainsi que celui du Proche-Orient, représentent indéniablement un intérêt de premier plan pour la Russie, il n’en reste pas moins que l’Afrique et l’Amérique latine font partie également des grands projets de Moscou à l’international. Et si jusqu’ici les relations les plus intenses étaient avec les pays du nord et du sud du continent africain, on arrive désormais à l’étape où la présence russe s’élargira certainement à toutes les parties de l’Afrique.

Moscou dispose de plusieurs avantages évidents : absence d’histoire coloniale vis-à-vis du continent africain. Plus que cela, l’URSS avait accordé un soutien de premier plan aux mouvements africains de libération nationale dans leur lutte contre le colonialisme et le néocolonialisme. Cela sans oublier une importante participation dans la formation des cadres africains, soit via la venue de spécialistes russes en terre africaine, soit en invitant des milliers d’étudiants africains à venir se former dans les universités soviétiques. Beaucoup de ces anciens étudiants occupent aujourd’hui des postes de première responsabilité dans un certain nombre de pays du continent. Tout cela ne s’oublie pas jusqu’à ce jour. D’autre part, la politique actuelle de la Russie attire nombre d’Africains. Sachant que Moscou axe sa politique extérieure sur trois piliers fondamentaux : attachement au droit international, respect de la souveraineté des nations, de même que de leurs valeurs et traditions historiques. Enfin, soutien au concept du monde multipolaire — le seul pouvant garantir des relations équitables et justes.

« Pour les pays africains, et particulièrement pour la RDC, la collaboration avec les BRICS est une opportunité de premier ordre pour sortir des relations asymétriques qui les relient aux pays de l’OCDE, dont nombre d’anciennes puissances coloniales. Des relations qui ont toujours été empreintes de domination, d’assistanat et de paternalisme. On relève aussi l’engament des BRICS d’investir dans des domaines clés comme l’infrastructure, l’agriculture et le transfert des technologies que nous percevons comme des leviers importants pour stimuler la croissance économique et le développement durable en Afrique. On note aussi le soutien des BRICS à un multilatéralisme inclusif qui est aussi perçu comme un moyen de renforcer la voix de l’Afrique dans les forums mondiaux et de promouvoir un nouvel ordre international plus juste. »

Avec les BRICS, l’Afrique la possibilité de traiter directement avec des pays dont la situation économique était identique à la leur il y a quelques décennies. Des pays qui, en tout état de cause, ont connu un parcours historique similaire. Et qui surtout ne traînent pas un lourd passé colonial. Les BRICS sont des partenaires très proches à plusieurs égards. De ce fait, ils sont davantage susceptibles de comprendre les attentes des pays d’Afrique. Les gouvernements africains négocient sur un même pied d’égalité, participent à des accords dans lesquels ils sont réellement parties prenantes dans un réel partenariat transparent et inclusif qui respecte les priorités et les intérêts des Africains.

Les pays africains, et particulièrement la RDC, ont l’obligation d’être en mesure de définir clairement leur besoin (vision) à l’échelle internationale et devraient avoir une capacité de négociation renforcée. Et pour ça, nous avons besoin d’une Afrique unie et coordonnée. Elle aura alors plus de poids dans les discussions avec les BRICS. Il faut que les dirigeants africains soient forts et visionnaires. Qu’ils soient en mesure de défendre réellement les intérêts de l’Afrique et négocier avec les BRICS des accords équitables. Le continent doit diversifier ses partenariats en s’engageant avec d’autres acteurs internationaux. Cela permettra de réduire sa dépendance vis-à-vis des BRICS et d’autres. Nous croyons que la coopération avec les BRICS offre un potentiel important pour la croissance et un développement mutuel. Il est cependant crucial, pour Etats africains, que ce partenariat se fonde sur des principes d’égalité, de transparence et de responsabilité de manière à garantir qu’il profite réellement au peuple africain. La société civile, enfin, devrait jouer un rôle central dans les négociations pour s’assurer que les priorités et les intérêts de l’Afrique soient réellement pris en compte.

En guise de conclusion, on peut dire que la relation commerciale entre les BRICS et l’Afrique présentent des défis importants, mais aussi des opportunités pour amorcer un développement autocentré. Mais cela passe par une stratégie proactive de diversification économique, de valorisation de ses ressources, de renforcement de ses capacités industrielles et de ses capacités de négociation et, bien sûr, par l’achèvement du processus d’intégration régionale. À ces conditions, l’Afrique pourra se libérer de cette dépendance du passé et s’engager sur la voie d’un développement durable et inclusif. Il est crucial de transformer la dépendance actuelle en une relation de partenariat mutuel (d’égal à égal) qui soit bénéfique pour l’Afrique.

Moscou, le 08/11/2024

Joseph Kindundu Mukombo

Diplomate et chercheur

Téléphone : 79850626254

jmkindundu@gmail.com

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