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1 juillet, 2024 - 04:23:34
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RDC : les décisions de la Cour Constitutionnelle ne souffriront d’aucune illégalité ou illégitimité jusqu’en 2024

En réaction à l’information qui circule dans l’opinion, il nous faut un recadrage scientifique pour expliquer aux apprentis scientifiques les ABC du droit constitutionnel congolais avec une dose d’interprétation objective des dispositions de la Constitution.

Le professeur Didier-Pierre Ndangi Bazebanzia affirme que les neufs membres de la Cour constitutionnelle sont hors mandat. Il développe nombreux points pour étayer son argumentaire. Et nous en relevons en ce qui nous concerne 4, qui sont examinés dans les lignes qui suivent.

1. Les 9 juges sont en fin mandat en vertu de l’article 158, alinéa 2 (3) et 14 de la Constitution car nommés depuis le 14 juillet 2014 avec un mandat de 9 ans.

  • Réaction critique :

Cette affirmation parait n’est correcte car elle souffre d’un manque de rigueur interprétative de textes légaux en la matière et d’imprécision sur le dies a quo pour qu’un mandat puisse commencer à courir, en droit public.

Premier élément : En effet, l’article 158, alinéa 3 ne doit pas être lu sans se référer aux dispositions pertinentes de la loi organique, notamment à l’article 8, qui dispose que le membre de la Cour nommé en remplacement de celui dont les fonctions ont pris fin avant terme achève le mandat de ce dernier. Il peut être nommé pour « un autre mandat » s’il a exercé les fonctions de remplacement pendant moins de trois ans.  Ce qui revient à dire qu’il y a possibilité que les juges poursuivent des mandats différents.

Deuxième élément : Il y a confusion sur le point de départ pour compter le mandat des différents juges constitutionnels. En effet, en droit public, le mandat commence à courir pour toutes les fonctions de mandat, sauf dérogation explicite, à partir du moment de la prestation de serment. Ce n’est pas au jour de la nomination !  Les juges ont prêtés serment en 2015, c’est de là que court le mandat.

Troisième élément : La Cour est selon la Constitution et la loi organique renouvelée par tiers tous les trois ans, par tirage au sort. A chaque trois ans, trois juges doivent quitter la Cour. Des nouveaux doivent intégrer la Cour. Ceux qui y intègrent avant l’achèvement du mandat de ceux qu’ils remplacent, achèvent le mandat de ceux partis. Mais dans le cas où ceux qu’ils remplacent avaient déjà fait trois ans, là les nouveaux commencent un nouveau mandat et leur dies a quo des 9 ans commence à courir. C’est aussi simple. Ainsi, nous aurons toujours une Cour dans laquelle l’on trouve des anciens et des nouveaux aussi longtemps que ces dispositions ne seront pas révisées.  A cet effet, ceux qui ont prêtés serment en 2015 après plusieurs renouvellement, démission et départ, se verront accomplir leur 9 ans en 2024. Et ceux qui sont entrés en 2018 verront, s’ils ne partent pas par tirage au sort, décès ou démission,  leur mandat aller jusqu’en 2027 et verront leur mandat de 9 ans être réalisés.

Quatrième élément : L’article 6, alinéa 2 de la loi organique de la Cour constitutionnelle dispose que la Cour est renouvelée par les tiers tous les trois ans. Lors des deux premiers renouvellements, il est procédé au tirage au sort du membre sortant par groupe initialement nommés. Ceci ne fut fait en 2018 à l’époque, et nous a conduits à la situation d’aujourd’hui. Vouloir y revenir nécessitera tout refaire, ce qui n’est pas évidemment une option heureuse.

2. La loi impose deux tiers de juristes, ce qui n’est pas le cas.

Cette affirmation est évidemment correcte. Elle n’appelle pas commentaire en principe, néanmoins, il va falloir préciser une évidence :

Réaction critique : L’obligation d’avoir deux tiers des juristes ne signifient pas que la loi veut seulement et absolument six membres juristes. Pas plus, pas moins. Mais elle impose un seuil minimal en deçà duquel la composition des membres de la Cour serait irrégulière. Cela ressort clairement de l’écriture de l’article 5, alinéa 1 de la loi organique qui dispose : « Six des neufs membres de la Cour doivent être des juristes issus de la magistrature, du barreau ou de l’enseignement ». Elle ne dit pas que les 1 tiers doivent être uniquement des non juristes, mais plutôt les 2 tiers doivent être juristes. Ainsi, là où la loi ne distingue pas, pourquoi distinguer ? Les 2/3 des juristes, c’est le seuil minimal que l’on doit absolument avoir. Mais pas le seuil maximal. L’on peut avoir une Cour n’ayant que des juristes. C’est la loi qui admet cette hypothèse. C’est ce raisonnement qu’il faut emprunter pour éviter des conclusions stériles.

3. Cette Cour ne respecte pas le principe paritaire : il n’y a qu’une seule femme.

Le ‘’professeur’’ affirme que la composition de cette Cour viole l’article 14 de la Constitution en ce qu’il n’y a qu’une seule femme.

Réaction critique : L’article 14 de la Constitution prône la parité en accordant à la femme le droit à une représentation équitable au sein des institutions nationales, provinciales, et locales. En effet, dans une institution sensible comme la Cour constitutionnelle, la sélection des membres obéit à nombreuses conditions, faisant qu’il ne suffit pas que l’on soit homme ou femme pour être juge à la Cour. Mais en parlant de la représentation équitable, il ne s’agit pas d’une donnée mathématique faisant que l’on puisse avoir 4 femmes et 5 hommes. Loin de là la volonté du Constitution. La représentation équitable tient compte en sus du nombre des femmes, de la rareté des femmes, de la spécialisation professionnelle de la femme en question et tant d’autres. Doit-on décorer la Cour en tenant compte du genre parce qu’il faut une représentation équitable ? De plus, dans un cercle fermé des neufs sages de la République, la présence du genre est une preuve du respect de l’article 14 de la Constitution. C’est équitable lorsque l’on tient compte des conditions juridiques et politiques pour être juge à la Cour.

4. La loi organique n’admet pas deux membres issus d’une même province

Le savant ‘’professeur’’ rappelle l’article 2 de la loi organique de la Cour constitutionnelle pour dire que la composition actuelle est violatrice de cette disposition.

Réaction critique : Il est possible d’être d’une même ethnie sans être d’une même province. Aujourd’hui les lubas sont dans deux provinces, les swahilis dans plusieurs provinces. Il semble oublier qu’à ce jour, il n’y pas deux juges de la même province, entendue au sens de l’article 2 alinéas 1 et 2 de la Constitution.

En conclusion, à lire la légèreté dans l’analyse de notre ‘’Professeur’’, il ne peut que s’agir d’un texte sorti tout droit d’un laboratoire politique avec pour objectif de porter atteinte au processus électoral en cours, dont la Cour constitutionnelle est un des maillons importants pour son aboutissement. Ceci ne peut que provenir des politiciens qui ont peur d’aller aux élections. Et pour bloquer le processus électoral, ils achètent les scientifiques pour lancer à leur place les ballons d’essaies. Malheureusement pour eux, ils recrutent dans le milieu des scientifiques médiocres. Ce qui est normal, de la médiocrité ne peut y sortir que la médiocrité.

Une tribune de Raphael MATUTA LUNGU, Chercheur indépendant.

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