Jeu d’argent basé sur la prédiction d’un résultat pendant ou à l’issue d’une rencontre sportive, les paris sportifs continuent de gagner en popularité à Kinshasa, la capitale de la République démocratique du Congo (RDC). Alors que ses adeptes, principalement des jeunes, misent quotidiennement des sommes d’argent variées dans l’espoir de remporter le jackpot, Infos27.cd a rencontré certains d’entre eux dans l’un des centres considéré comme le sanctuaire des parieurs, situé au rond-point des huileries, afin de comprendre leur perception de cette activité.
Les parieurs sont concentrés. Comme dans une salle de cinéma où un film à succès est projeté, ils occupent toutes les chaises en plastique disposées devant plusieurs télévisions. Certaines diffusent les matchs des championnats européens, tandis que d’autres affichent en direct les scores des différentes rencontres sportives en cours. Certains ont les yeux rivés sur leurs tickets pour vérifier les derniers résultats, tandis que d’autres sont debout devant des ordinateurs fixés au mur, en train de sélectionner leurs matchs pour parier.
En ce lundi 30 octobre 2023, le soleil est accablant sur Kinshasa lorsque Gipsy Kayembe, âgé de 30 ans, pénètre dans ce centre de paris sportifs pour “tenter sa chance”. Malgré la présence de ventilateurs qui renouvellent l’air, le jeune homme a chaud. Vêtu d’un tricot et d’un pantalon blancs, il enlève son par-dessus pour rester avec un singlet de la même couleur, avant de se livrer à son exercice préféré, comme de nombreux autres présents. “Être parieur n’est pas une profession. Je travaille dans une boulangerie, Pain-Victoire, et je suis même matriculé. Donc je ne vis pas uniquement des paris sportifs”, déclare-t-il en montrant sa carte de service.
Mais remporter un jackpot ou un gain n’est pas une mince affaire pour les parieurs. En plus d’être “aléatoire”, ce succès requiert de la virtuosité et de l’expérience, des atouts dont Gipsy est pleinement conscient. “Cela fait plusieurs années que je joue à ce jeu, même si je ne gagne pas de l’argent tous les jours. Avant de parier sur une équipe, je m’efforce de connaître les dernières nouvelles : sa position dans le classement de son championnat, les équipes plus fortes que lui, tout cela est documenté à l’avance”, argumente ce jeune parieur kinois. Avec sa souris tenue dans la main droite, il nous parle de son activité avec des illustrations à l’appui : “Le pari sportif nous offre plusieurs possibilités de parier. Par exemple, pour ces équipes, j’ai parié de telle manière que les deux équipes marquent des buts lors de la rencontre de ce soir, mais à condition que l’une d’elles gagne. En revanche, pour d’autres équipes, j’ai parié qu’elles marqueraient plus de buts en deuxième période du match, en me basant sur les cotes qui leur sont attribuées. Lorsque vous misez une petite somme d’argent, votre récompense sera également petite, et vice versa”, explique-t-il ouvertement.
Entre gains et passion
À quelques mètres de Gipsy, se trouve un guichet où les gagnants font la queue pour être payés. Parmi eux, Didistone Bindusa, très joyeux, vient de remporter une somme de 50 000 FC. Ce n’est pas la première fois, car le dimanche 29 octobre dernier, il a remporté 200 000 FC. Pour lui, les paris sportifs sont une question de mathématiques. “Même s’il y a des personnes qui considèrent ce jeu comme une profession, je ne le vois pas ainsi. Je suis motard. Même de grands patrons jouent aux paris sportifs”, soutient-il, dans le brouhaha, avant de compter son argent et de quitter les lieux.
Didistone n’a pas autant d’expérience que Gipsy dans les paris sportifs. Mais contrairement à ce dernier, il a pu rejoindre un groupe sur le réseau social WhatsApp, composé de parieurs qui partagent leurs pronostics avant de miser leur argent. “Dans ce forum, je trouve tout ce dont j’ai besoin. Je m’inspire de ce qui est publié pour composer mes matchs. Et je ne joue pas tous les jours”, explique ce jeune parieur.
Dans le centre de paris sportifs du rond-point des huileries, de nombreux parieurs interrogés ne considèrent pas ce jeu comme une profession, en dehors de son attrait étonnant. Chacun exerce une autre activité qui lui procure de l’argent. Récemment, une étude menée auprès de 2365 Kinois, du 6 au 9 septembre de cette année, par le cabinet Target SARL pour mieux comprendre l’ampleur des paris sportifs dans la capitale, Kinshasa, a révélé que 32% des habitants de la ville jouent à ces jeux : football, loto, jackpot et casino. Les hommes sont majoritaires parmi les parieurs, représentant 84% des effectifs, contre seulement 16% de femmes. Ce pourcentage pourrait augmenter, compte tenu du taux de chômage galopant dans la ville.
CK