Nous assistons à une scène similaire au film hollywood sur la corruption et les délits d’initiés orchestrés à un haut niveau. Des voix s’élèvent pour dénoncer l’imbroglio juridique autour d’une convention dite «contrat de consultance» signée entre l’Inspection Générale des Finances (IGF) et la Générale des Carrières et des Mines (GÉCAMINES SA).
Qui de la portée juridique d’un contrat dit de consultance ?
C’est donc un secret de polichinelle d’avouer que le rapport établi par la Cour des Comptes révèle l’ampleur d’un scandale dudit contrat, entre d’une part l’IGF, un service public qui assure le contrôle administratif. Elle vérifie et contrôle toutes les opérations financières de l’État. Et d’autre part la GECAMINES, une entreprise du portefeuille de l’Etat dont la nature juridique est une société commerciale.
Dans un rapport rendu public par la Cour des Comptes sur la mission de contrôle de 90 jours effectuée par l’Inspection Générale des Finances. Ledit rapport démontre clairement que l’inspection générale des finances se comporte dorénavant comme un cabinet d’Audit et de Conseil privé auprès des sociétés du portefeuille de l’Etat, ainsi que des établissements publics, en contrepartie d’un payement échelonné des “billets verts”, c’est-à-dire des milliers de dollars. Quant à l’échéance du terme, tout dépend de la durée du contrat suivant les clauses contractuelles.
De la patrouille financière à la conclusion dorénavant des contrats de consultance : où va l’IGF ?
D’aucuns se demandaient il n’y a pas longtemps que les télévisions et radios diffusaient des massages de sensibilisation de l’IGF autour de la patrouille dite financière. En associant voire même, des comédiens et des musiciens pour véhiculer le message. Certes, la même institution dit une chose et fait le contraire ou même pire. Le récent rapport de la Cour des Comptes en est la preuve probante.
En lisant le rapport publié par la la Cour des Comptes, la mission de l’IGF s’est transformée en une mission de la formation des agents et cadres de la GECAMINES, moyennant des honoraires de 750 000 USD couvrant les prestations allant de novembre 2023 à Février 2024.
La question qui taraude est celle de comprendre comment l’Inspection Générale des Finances peut se livrer à un tel exercice auprès de son assujetti pendant une mission de contrôle ?
Pour répondre à cette question, il s’avère impérieux de s’inspirer d’une maxime de l’écrivain français Jean le Rond, décrivant une dangereuse psychologie matérialiste : « Le contrôleur général, à qui j’ai offert mes services à condition qu’ils seraient gratuits, me disait il y a quelques jours qu’il voudrait bien faire quelque chose pour moi ».
Par ailleurs, l’Inspection Générale des Finances, n’a aucune mission dévolue de former les agents des services publics en passation des marchés publics. Cela relève d’une prérogative d’un établissement public, dénommé l’Autorité de Régulation des Marchés Publics (ARMP), conformément à l’article 10 du décret n°10/21 du 2 juin 2010 portant création, organisation et fonctionnement de ladite institution. En droit administratif, la compétence étant d’attribution, l’ordonnance n° 20/137-b du 24 Septembre 2020 modifiant l’ordonnance n°87-323 du 15 septembre 1987 portant création de cette Inspection, n’attribue nullement à l’IGF la compétence de procéder à la formation des agents et cadres en passation des marchés publics.
Par conséquent, nous pouvons déduire qu’il s’agit d’un conflit d’intérêt. Et cela entrave le code de bonne conduite des agents publics de l’Etat qui interdit aux agents publics de jouer le double rôle : celui de contrôle d’une entité économique ou agent économique et celui de signer un contrat de conseil financier de la même entité ou agent économique. Selon l’article 129 de la loi de 2011 relatives aux finances publiques, cette pratique constitue une “faute de gestion” de la part de l’Inspecteur en chef de l’IGF. Seule la Cour des comptes est compétente pour connaître cette matière conformément à l’article 167 de la loi organique n° 18/024 du 13 novembre 2018. Aussi la constitution du 18 février 2006 telle que modifiée par sa loi constitutionnelle n° 11/002 du 20 janvier 2011, donne un pouvoir large en matière de contrôle juridictionnel des finances publiques à cette juridiction spécialisée.
Béni Kinkela
(Juriste d’affaires et spécialiste en droit des finances publiques, droit des sociétés, droit Minier, droit bancaire, etc.)