Jamais la République démocratique du Congo n’était allée aussi loin dans la mise en cause d’un ancien chef de l’État. En exil depuis plusieurs années et silencieux face aux accusations, Joseph Kabila est officiellement convoqué ce mardi 20 mai par une commission spéciale du Sénat, chargée d’examiner la levée de son immunité parlementaire. Soupçonné de complicité avec la rébellion du M23, le sénateur à vie est invité à faire valoir sa version des faits. Mais son absence attendue ne devrait pas empêcher la machine institutionnelle de poursuivre son cours vers une décision aux allures de tournant historique.
Le processus judiciaire visant l’ancien président de la République démocratique du Congo, Joseph Kabila, a franchi une nouvelle étape au Sénat. Une commission spéciale a été mise en place à la suite de l’adoption, le 15 mai, d’une résolution relative à la demande de levée de l’immunité parlementaire du sénateur à vie, accusé de complicité avec le mouvement rebelle AFC/M23.
Présidée par Christophe Lutundula, ancien vice-Premier ministre en charge des affaires étrangères, la commission a entamé ses travaux lundi 19 mai. Elle dispose d’un délai de 72 heures pour analyser le réquisitoire transmis par l’auditeur général près la Haute Cour militaire et soumettre un rapport à la plénière, attendue d’ici mercredi 21 mai. Ce document servira de base à la chambre haute pour trancher sur la suite à donner à cette procédure inédite.
Dans une correspondance largement relayée sur les réseaux sociaux, l’ancien chef de l’État est invité à se présenter devant la commission ce mardi 20 mai. Cette convocation vise, selon le document, à lui permettre de faire valoir sa version des faits. Mais selon plusieurs sources parlementaires, l’absence de Joseph Kabila, qui n’a plus reparu en public depuis plusieurs années et dont l’exil est de notoriété publique, semble acquise.
Une procédure sans précédent
La commission parlementaire a pour mandat d’auditionner toutes les parties jugées utiles à l’instruction du dossier. « Il ne s’agit pas d’un procès, mais d’un exercice institutionnel destiné à évaluer la recevabilité de la requête de l’auditorat militaire », a déclaré un sénateur sous couvert d’anonymat. L’issue des travaux devrait permettre à la plénière de se prononcer sur la levée ou non de l’immunité de M. Kabila, condition préalable à toute poursuite judiciaire à son encontre.
L’éventuelle implication de l’ancien président dans la rébellion, que l’auditorat militaire qualifie de « complicité avérée avec une entreprise de déstabilisation de la République », n’a pas encore été démontrée publiquement. Mais la symbolique est forte : c’est la première fois qu’un ancien chef de l’État congolais est visé par une procédure de levée d’immunité depuis l’instauration du Sénat à vie pour les ex-présidents.
Une décision politique à venir
La décision finale appartient à la plénière du Sénat, qui reste souveraine en la matière. Si la levée d’immunité est adoptée, Joseph Kabila pourrait être convoqué par la Haute Cour militaire pour répondre des faits mis à sa charge. Faute de comparution, un mandat d’amener ou un mandat d’arrêt pourrait être émis, selon les options que retiendra la justice.
Pour l’instant, le camp Kabila n’a fait aucune déclaration publique.
Infos27