Suite à l’instabilité de l’électricité à Kinshasa, la capitale de la République Démocratique du Congo (RDC), plusieurs ménages utilisent le charbon de bois pour la cuisson. Et pourtant, ce combustible provient d’autres provinces du pays à l’instar du Kongo-Central ou encore du Kwilu. De port de Safu dans la commune de Maluku au marché Gambela, dans la commune de Kasa-Vubu, Infos27 à pénétrer les réalités qui entourent la commercialisation de charbon de bois à travers la ville.
Ce samedi 23 septembre 2023, il est 16 heures lorsque Fiston Mituku, 43 ans, vient contrôler ses sacs de charbon de bois au port de Safu, sous un soleil couchant. Situé au bord du majestueux fleuve Congo dans la commune de Maluku et vidé de l’immense majorité de ses trafiquants, « ce lieu est surtout d’importation de charbon de bois, farine… à Kinshasa. Le travail commence à 7 heures, c’est le moment auquel on siffle. Si tu venais avant cette heure-là, tu allais voir du monde ici. »
D’une voix audible, Fiston parle de son travail avec enthousiasme et virtuosité. Ce jour-là, après l’effectuation de son contrôle, il couvre ses marchandises d’une bâche de couleur bleue pour regagner son domicile, parce « qu’il n’y a plus assez d’acheteurs dans la soirée. »
Vêtu en une chemise à manches longues et un pantalon, le tout en couleur noir, le grossiste, Fiston Mituku indique que la production du charbon de bois s’effectue généralement dans les zones où la forêt est dense car, « il vient de Kwamouth, Mambutuka, Mayimpili, dans l’intérieur du pays. » Mais en dépit de son importation, certains grossistes ont réussi à produire ce combustible au port de Safu. « Ils ont créé des fours dans lesquels, ils brûlent les morceaux de bois pour obtenir le charbon. Ces bois, ils les obtiennent à partir des arbres, comme des manguiers et avocatiers, qu’ils achètent en les abattant dans les parcelles des particuliers moyennant 10.000 FC, » confie ce quadragénaire. Lorsqu’il épingle ce cas, il ne peut s’empêcher d’illustrer cela par un exemple concret derrière lui, celui d’un four couvert des sables dans lequel certains morceaux de bois en feu, laissent sortir les fumées, au travers d’un trou.
Fiston Mituku est charbonnier depuis cinq ans. Lui, qui s’est imprégné de l’esprit de ce secteur d’activité en œuvrant d’abord pour ses frères avant de créer, plus tard, son propre business, il explique que « ceux qui créent une affluence des gens au port de Safu, ce sont les détaillants du centre-ville, ils peuvent acheter à chacun 30 à 100 sacs de charbon de bois au quotidien pour la revente, » renseigne t-il en précisant « qu’un sac de charbon de bois est vendu à 27 000 voire 27 500 FC, tout dépend de la qualité que l’acheteur veut. »
L’étonnante revente dans le centre-ville
Pour une bonne perspective de la revente de ce charbon de bois dans le centre-ville, nous nous sommes rendus, dans la journée du mardi 26 septembre de l’année en cours au marché Gambela, situé à plus ou moins 80 kilomètres de port de Safu, dans la commune de Maluku. Là, l’un des endroits réputés pour la vente de charbon de bois, c’est l’avenue Maringa. Ici, un sac de charbon de bois est vendu à près de 60 000 FC. Mais pourquoi cette tarification ? « Nous achetons le charbon de bois au port de Ndolo, dans la commune de Barumbu. Là bas, on achète un sac à 48 000 FC, à cela il faut ajouter la taxe des propriétaires de ce port qui s’élève à 1200 FC puis on donne 5000 FC au porteur pour l’amener ici, » explique la vendeuse Alphonsine, prise en tenaille de ces collègues.
« La plupart de ces sacs de charbon de bois que nous achetons au port de Ndolo, proviennent du port de Safu. Donc il y a plusieurs variétés de charbon de bois : pesantes et légères, chacune avec sa tarification. Il y a même le sac de 40 000 voire 45 000 FC, » renchérit Antoinette.
Ces dames vendent également le charbon de bois en détail. Le prix d’un sachet de ce combustible commence à partir de 1000 FC. Pour raconter ce qu’elles rencontrent comme difficultés dans l’exercice de leur métier, qui « attire les acheteurs, » les mots se bousculent, elles s’interrompent l’une et l’autre. Alphonsine reprend : « ce qui nous donne la peine ici, c’est l’exigence d’une certaine catégorie d’acheteurs qui veulent que le charbon de bois qui pèse, en lieu et place, de celui qui est léger, trop fréquente sur le marché, » révèle-t-elle.
« Je ne préfère pas le charbon de bois léger c’est parce qu’il se dissout rapidement dans le feu, » se justifie un acheteur de charbon de bois « pesant », qui a requis l’anonymat.
A en croire une étude présentée, le mercredi 22 septembre 2021, par le Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement (CIRAD), 17 millions de tonnes de charbon de bois sont utilisés chaque année par plus de 95 % de ménages de Kinshasa, capitale de la République Démocratique du Congo (RDC). Les résultats de cette étude expliquait que le recours par plus de 95% des ménages de la capitale congolaise au charbon de bois est dû à l’inaccessibilité à l’électricité qui se fait de plus en plus rare dans les ménages de Kinshasa. Un pourcentage incroyable, avec la problématique de l’électricité, qui peine à être résolue, le charbon de bois sera encore longtemps un moyen que tous les kinois utiliseront pour la cuisson.
CK