Entre Jules Alingete, Inspecteur général des finances, et Tony Mwaba Kazadi, ministre de l’Enseignement primaire, secondaire et technique (EPST), les tensions sont vives pour des faits qui ne devraient en aucun cas opposer les deux institutions : l’Inspection générale des Finances et le ministère de l’EPST, toutes deux engagées à promouvoir l’image de la République avec des valeurs telles que l’instauration de la culture de bonne gouvernance publique. Les faits – source de discorde – mis en lumière par le ministre de l’EPST, via des vidéos devenues virales, montrent des inspecteurs de l’IGF déployés dans son cabinet et actifs sans qu’il en soit informé, semblent être la partie visible d’un conflit latent. Rien ne peut expliquer que la situation ait dégénéré, surtout lorsque l’on sait que les administrations sous Tshisekedi sont constamment contrôlées. En l’occurrence, l’ordre de mission des envoyés de Jules Alingete concerne notamment le contrôle de la gestion des fonds alloués à la DINACOPE pour le fonctionnement des écoles et la prime de gratuité, ainsi que le contrôle de la perception et de la gestion des différents frais de participation des finalistes à l’Examen d’Etat. Le fond est là, mais la forme a-t-elle été respectée ? La question demeure. Dans une démocratie, tant la forme que le fond sont importants. Cela signifie que les deux acteurs, tous deux essentiels pour le régime Tshisekedi, devraient faire preuve de retenue plutôt que d’étaler leurs divergences au grand jour, dès lors que chacun estime agir de manière irréprochable, que ce soit le contrôleur ou le contrôlé. Cette guéguerre est ainsi évitable.
Est-ce un nouveau numéro de l’épisode vécu en août 2021 entre Tony Mwaba, ministre de l’EPST et Jules Alingete, le flic financier, se lançant des pics ? Difficile de répondre. Néanmoins, l’image de la guéguerre entre les deux personnalités est loin d’être positive pour le pays surtout pour des acteurs qui sont tous censés se fonder dans leurs actions respectives sur des valeurs que prône le chef de l’Etat, Félix Tshisekedi, dans la dynamique de l’enracinement de la bonne gouvernance en République démocratique du Congo.
Les faits
Dans une restitution documentée après la diffusion virale d’une vidéo montrant trois inspecteurs des finances se faisant réprimander par le ministre de l’EPST dans la cour du ministère pour ce qu’il a qualifié d’égarements dans leur manière d’opérer, la Cellule de Communication du Ministère de l’Enseignement Primaire, Secondaire et Technique a indiqué qu’une mission de contrôle avait été diligentée par l’Inspection Générale des Finances pour une durée de six mois, à partir du 24 janvier 2024. Cette mission avait pour objet trois points principaux : contrôler la gestion des fonds alloués à la DINACOPE (la Direction nationale de contrôle, de la préparation de la paie et de la maîtrise des effectifs des enseignants et du personnel administratif des établissements scolaires) dans le cadre du fonctionnement des écoles et de la prime de gratuité ; contrôler la perception et la gestion des différents frais de participation des finalistes à l’Examen d’Etat ; enquêter et établir les responsabilités sur les irrégularités constatées.
Le ministre de l’EPST, Tony Mwaba, est rentré au Cabinet vers 17 heures le mercredi 31 janvier, alerté sur des actes qui frisaient, selon lui, le gangstérisme, notamment la confiscation des biens personnels du comptable public, dont une somme de 1300 dollars américains et 200 euros, par les trois inspecteurs de l’IGF. « Invités au Cabinet du ministre pour éclaircir cette situation, ils ont tenu des propos arrogants et évoqué un trafic d’influence, affirmant qu’ils ne dépendaient pas du ministre, mais plutôt du Président de la République. C’est pourquoi le ministre est descendu pour s’entretenir avec eux, un entretien qui a été filmé et partagé sur les réseaux sociaux sans son consentement », note-t-on dans la mise au point faite par le ministère de l’EPST.
Pour la Cellule de Communication du ministère, Tony Mwaba n’a pas opposé de résistance à cette mission, car elle ne concerne pas le détournement de 70 milliards de Francs congolais destinés à la prime d’encadrement de la paie des services centraux de l’EPST. En réalité, le ministre de l’EPST estime que ce contrôle n’a pas lieu d’être, car les frais de fonctionnement des écoles et la prime de la gratuité ne sont pas gérés par la DINACOPE, qui se limite à préparer la paie des enseignants en envoyant aux ministères des Finances et du Budget les listings de paie des enseignants, ainsi que la prime de la gratuité qui est versée par les banques commerciales aux chefs d’établissements. « Si un contrôle devait être effectué, il devrait être dirigé vers les banques et les chefs d’établissements qui gèrent ces fonds, à moins qu’il ne s’agisse d’un acharnement pour des raisons de positionnement politique », souligne-t-on du côté du ministère de l’EPST. En ce qui concerne les frais de participation des finalistes à l’Examen d’Etat, le ministère de l’EPST ne comprend toujours pas les motivations de l’IGF, car depuis 2021, l’État congolais ne paie plus ces frais, ce qui perturbe d’ailleurs l’organisation des épreuves certificatives. Ainsi, la Cellule de Communication du ministère de l’ESPT indique que le ministère reste ouvert à cette enquête.
Lever le voile
L’Inspection Générale des Finances, qui est restée silencieuse jusqu’à présent face à toute demande d’éclaircissement sur ces faits évoqués, devra impérativement lever le voile. Il serait cependant préférable que cette communication soit faite dans le but de préserver l’honneur républicain, en évitant toute considération personnelle, afin que seul l’intérêt supérieur de la nation, qui passe également par ce contrôle supérieur, qu’il soit a priori, concomitant ou à posteriori, soit préservé dans le cadre de l’évolution d’un Congo qui promeut des valeurs dans sa gouvernance. Cela nous éloignerait ainsi de tout acharnement sur un individu. En fin de compte, l’engagement envers le chef de l’État, Félix Tshisekedi, doit être au service de la Nation. Point final.
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